29 novembre 2017

Cousu de fil jaune

Cousu de fil blanc ou de fil jaune, l’écosuicide se poursuivra. Autrement dit, la tutelle économique asiatique n’est pas pire que la tutelle économique occidentale. Le péril jaune tel que conçu au 19e et 20e siècle laissait supposer que les peuples d’Asie allaient surpasser les Blancs et gouverner le monde. Cependant, on peut objectivement noter que le tsunami économique asiatique a mis en péril l’économie de plusieurs pays en divers continents.

«N’oubliez jamais les surprises que peut réserver l’ordre de préséance. La superpuissance d’aujourd’hui est l’état conquis de demain. Le groupe méprisé d’hier est souvent le dirigeant de demain. Ne sous-estimez jamais le tiers-monde. Ne faites jamais preuve de suffisance. 
    La méthode utilisée par la Nature pour tester un outil autoréplicant est la compétition. Depuis plus de trois milliards et demi d’années, elle a placé les produits du système génétique dans une course visant à déterminer qui peut accaparer les bonnes choses de la vie.» ~ Howard Bloom (Le Principe de Lucifer, Les jardins des Livres, 2001)

On peut quand même se demander quelle sorte de menace peut bien peser sur nos Conseils des SMinistres (fédéral et provinciaux), pour qu’ils ouvrent la porte toute grande aux Chinois (1). Et l’on rit jaune quand on voit les nations qui veulent protéger leurs ressources, leurs terres, leurs biens et l’eau se faire taxer de populisme.

Dans le cadre du libre-échange Canada/Chine, le consul général de la République populaire de Chine à Montréal, Peng Jingtao, déplorait la présence d'un seul vol direct Montréal-Pékin. «Le vol direct a réduit la distance entre nos deux pays, situés aux deux extrémités du monde. Avec plus de vols directs dans des villes comme Shanghai, qui compte plus de 20 millions d'habitants, ou Shenzhen, qui en compte plus de 18 millions, le Canada serait accessible à plus de Chinois», estimait-il.

Le continent asiatique compte 4 milliards d’habitants. La chine : 1,4 milliard.

Une présence de plus en plus affirmée

Août 2015, ICI Radio-Canada info – Nommé représentant du Québec en Chine, l'ex-journaliste Jean-François Lépine est optimiste quant à l'avenir économique de ce pays. Il considère que son rôle consistera dans un premier temps à rassurer les Québécois et à leur expliquer que les Chinois vont continuer à investir ici. «C'est très important pour le Québec», expose-t-il. Dans un deuxième temps, il souhaite convaincre les Québécois d'accroître leur présence en Chine et compte ouvrir, pour eux, des portes sur le marché chinois. Jean-François Lépine croit qu'il y a des «opportunités fabuleuses» dans ce pays. Il aura également comme mandat de développer la coopération dans les domaines de l'éducation, de la recherche, de l'innovation et de la culture. De plus, il s'assurera de faire connaître nos grands projets comme le Plan Nord, la stratégie maritime et également l'électrification des transports. Jean-François Lépine accompagne des entreprises et des organisations québécoises dans leur développement international grâce à une compagnie qu'il a fondée.
   Deuxième puissance économique mondiale, la Chine est le premier partenaire commercial du Québec en Asie. En 2014, les échanges commerciaux avec ce géant asiatique se chiffraient à près de 12,5 milliards de dollars dans les domaines de l'aéronautique, des technologies de l'information et des communications, la construction, l'environnement, l'industrie bio-alimentaire et la santé.

Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, s'était rendu en Chine en octobre 2014. Au cours du premier point de presse de sa mission chinoise à Shanghai, il avait indiqué qu'il allait «mettre des gants blancs au cours de ses entretiens avec les chefs communistes», dans ce pays où les droits civils comme les libertés d'opinion, de la presse et de la conscience sont bafouées. Selon lui, il faut du tact et éviter de faire la morale aux Chinois. Mais Philippe Couillard faisait surtout la tournée de l'Empire du Milieu pour mousser sa stratégie maritime et particulièrement le Plan Nord, qu'il voulait relancer.
    Dans la délégation québécoise, on remarquait la présence de la filière agroalimentaire. L'industrie du porc mise sur le marché chinois, comme en témoignait la participation d'Olymel et des Éleveurs de porcs du Québec.

Parenthèse 
Qui subira la pollution causée par les méga-porcheries dont la production ira en Asie? NOUS. Et ce n’est pas une mince affaire – allez en visiter une, vous comprendrez. On sent les émanations pestilentielles des piscines olympiques de lisier à 20-30 km à la ronde! Sans parler des cadavres non ramassés quotidiennement et rassemblés sous des abris de bois au bord des routes longeant les fermes. C’est une industrie extrêmement polluante. Les Chinois sont de gros mangeurs de porcs... et de chiens domestiques. Ils mangent tout ce qui bouge.

Tapas asiatiques 

Foies de chiens et petits légumes  

Ragoût de viscères de cheval et de bœuf

Soupe à la cervelle de chiens (inclut parfois des pénis de chiens)

La consommation d'animaux vivants consiste à manger des animaux tandis qu'ils sont encore en vie. Elle est répandue surtout en Asie. On peut consommer vivants des vertébrés ou des invertébrés. Manger des animaux vivants ou des parties d'animaux vivants peut être illégal sur certains territoires en vertu des lois réprimant la cruauté envers les animaux. Des interdits alimentaires existent aussi dans diverses religions du monde.

Voici sans aucun doute le plat le plus controversé. Certains prétendent qu’il s’agit d’un canular. En Chine, et dans d'autres pays, le singe est présenté vivant et le crâne ouvert aux convives. L'animal est attaché et ne sera servi que lorsqu'il aura perdu connaissance. On prête à ce plat la vertu de guérir l'incontinence. 


En Corée et en Chine, le vin de souriceaux est considéré comme une boisson tonifiante. Le goût du vin de souriceaux s'apparente un peu à l'essence. Les souriceaux sont arrachés à leur mère dès la naissance et plongés vivants dans le vin de riz.
   Séchés et salés, le sperme de thon est servi comme mignardise en Sicile. Ce met est considéré comme aphrodisiaque… 
   Dans le grand Nord, la viande de requin rencontre un franc succès… et c'est à moitié pourrie que les Islandais la préfèrent. Ils ont longtemps cru que le requin du Groenland ou requin géant ne pouvait pas être mangé frais en raison de la trop forte concentration d'acide urique. La viande est donc enterrée dans le sol pour une période pouvant aller jusqu'à six mois, ce qui entraîne un processus de décomposition et de pourriture. La puanteur qui s'en dégage (mélange d'ammoniac et de viande pourrie) est si forte que même les animaux sauvages ne la volent pas.
   Il est difficile de déterminer qui l'emporte en matière de cruauté envers les animaux. Tous les carnivores et les peuples ont leurs coutumes barbares. Par exemple, la méthode halal et kasher consiste à vider l’animal de son sang tandis qu’il est vivant – la mort lente. Les cannibales pourraient au moins tuer leurs proies rapidement et en bonne et due forme avant de les consommer, ce que font généralement les autres animaux.Et puis, n'oublions pas la vivisection. Pf!
Fin de la parenthèse

Bref, pour en revenir à l'économie, les démarches de nos courtisans, lobbyistes et entrepreneurs ont porté fruit... ils ont réussi à vendre le Canada, et à rabais semble-t-il. Le Plan Nord de Jean Charest se réalisera. Avec la multiplication des projets miniers à ciel ouvert, dont les cratères sont rarement nettoyés et restaurés une fois vidés, le Québec finira par ressembler à la face cachée de la lune!

Photo : Lunar Reconnaissance Orbiter (Wide Angle Camera) NASA.

L'influence de la Chine dans la réalisation du Plan Nord s'accentue, tant par les capitaux investis que par sa demande de fer

C'est avec le projet d'exploitation de mine de fer Otelnuk d'Adriana Resources, situé à 170 km au nord de Schefferville, que la Chine pourrait affirmer sa présence dans l'économie minière du Québec. En 2011, l'aciériste chinois Wisco a pris le contrôle du projet en injectant environ 120 millions de dollars dans Adriana pour acquérir 19,9 % des actions de la société, ainsi qu'une participation directe de 60 % dans le projet. Wisco s'occupera du financement du projet.
    Dans le nickel, Jilin Jien Nickel Industry a avalé successivement Canadian Royalties et Goldbrook Ventures pour accaparer la mine de nickel Nunavik Nickel, située dans la baie d'Ungava, à une vingtaine de kilomètres à l'ouest de la mine Raglan. La société investira près de 800 M$ pour mettre la mine en production.
    Chengdu Tianqi Industry Group a investi quant à elle plus de 9 M$ dans Nemiska Exploration pour mettre en valeur son gisement de lithium près du village cri de Nemiska.
    Wisco et Minmetals sont aussi des acteurs financiers importants dans Century Iron Mines, laquelle s'est emparée du gisement de fer de Ressources minières Augyva à la Baie James. Century a trois autres projets de fer au Québec et un au Labrador qui nécessiteront des dizaines de milliards de dollars d'investissement.

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Une raison supplémentaire d’éviter les centres d’hébergement privés et publics, vu que les Chinois ne respectent pas les droits de la personne :   

Préposés aux bénéficiaires : la solution à la pénurie est-elle à l'étranger?
Davide Gentile | ICI Radio-Canada nouvelles | 23 novembre 2017

La pénurie de préposés aux bénéficiaires est tellement sévère que l'Association des ressources intermédiaires d'hébergement du Québec (ARIHQ) envisage de recruter à l'étranger. Cette pénurie commence même à toucher le réseau public.
    «On a de la difficulté à embaucher. La pénurie est vraiment importante», explique Alexandre Bourgeois, de l'ARIHQ, qui est également propriétaire de la résidence Le Voilier. ... Cette situation prévaut dans plusieurs autres ressources intermédiaires de la province.
     Une partie de la solution passerait par le recrutement à l'étranger. «En tant qu'organisation, on analyse les possibilités avec la France et la Chine, affirme M. Bourgeois. On pourrait conclure une entente avec le ministère de l'Éducation pour franciser ces gens-là en Chine pour qu'ils suivent le cours de préposé au Québec 


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Une île à 5 millions près de Québec
Gabriel Béland | La Presse | 25 novembre 2017

Un paradis de chasseurs millionnaires, à un jet de pierre de l'île d'Orléans, est en vente pour la rondelette somme de 5 millions de dollars. La propriété suscite même l'intérêt d'acheteurs chinois qui aimeraient mettre la main sur l'une des plus grandes îles privées du fleuve Saint-Laurent.
    L'île au Ruau, avec sa vue sur le mont Sainte-Anne, fait 4 km de long sur 500 m dans sa portion la plus large. Elle est recouverte de forêt et de champs, peuplée d'oies et de chevreuils, au grand bonheur d'un club de chasse qui regroupe certaines des plus grandes fortunes du Québec. «Le prince Philip a déjà chassé ici, révèle le propriétaire de l'île au Ruau, William O'Brien fils. Il y a plusieurs autres grands financiers, des premiers ministres, des ambassadeurs qui sont venus sur l'île. Mais on a comme règle de garder tout ça secret.»
    C'est le père de M. O'Brien qui a acquis l'île au Ruau en 1962. La famille l'a depuis conservée pour en faire un territoire de chasse. La municipalité de Saint-François-de-l'Île-d'Orléans, dont relève l'île, l'a zonée «conservation».
    William O'Brien aimerait vendre à quelqu'un qui conservera le caractère de l'endroit. Tout juste mise sur le marché, l'île suscite déjà la convoitise d'investisseurs chinois, selon le vendeur et son courtier, Guillaume Tremblay, de RE/MAX.
    M. O'Brien dit espérer qu'un acquéreur québécois se manifeste. «Il est vrai qu'on a eu un intérêt immédiat venant de la Chine. Mais je serais plus à l'aise si les nouveaux propriétaires connaissaient l'île. Son histoire est importante. Mais on verra.»


Les nouveaux riches chinois s’intéressent aux vignobles.

Comment la Chine achète le Canada
Le marché du logement se transforme, bien au-delà de Vancouver.
L’actualité | août 2016

Depuis cinq ans, les investissements de la Chine continentale dans le marché immobilier canadien ont atteint des proportions inquiétantes selon certains, si bien qu’une atmosphère de ruée vers l’or règne maintenant dans les métropoles du pays, attisant la grogne des jeunes Canadiens de la classe moyenne, qui se sentent exclus du marché de leur propre ville.
    Le boum sans précédent de Vancouver, dont la flambée fulgurante des prix a rendu caducs les indicateurs traditionnels, comme le revenu moyen des ménages et l’activité économique régionale, est certainement l’exemple le mieux connu et le plus controversé des contrecoups de cet afflux massif de capitaux étrangers. «On laisse venir ici des gens qui ne veulent qu’un abri pour leur argent», déplore Justin Fung, ingénieur logiciel canado-chinois de deuxième génération, exaspéré lui aussi par l’allure surréaliste du marché immobilier de Vancouver. «Ils font grimper les prix des maisons et ils traitent la ville comme leur hôtel.»
    À Vancouver et à Toronto [désormais à Montréal], les investissements chinois ont contribué à la formation d’une bulle immobilière aux proportions montgolfiéresques. [...] Au printemps dernier, les politiciens et responsables du développement économique en Nouvelle-Écosse ont accueilli triomphalement l’achat d’une série de propriétés par DongDu International, un promoteur établi à Shanghai qui projette de construire à Guysborough deux centres de villégiature destinés à de jeunes professionnels chinois fortunés. [...]

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(1) Tout s’explique...

Marching honour guards shout as Chairman of U.S. Joint Chiefs of Staff Joseph Dunford is welcomed by his Chinese counterpart, chief of the general staff of the Chinese People's Liberation Army General Fang Fenghui, during a welcoming ceremony in Beijing, China August 15, 2017. REUTERS/Thomas Peter

Si jamais vous voyez des touristes chinois vêtus de la sorte au Canada, fuyez ou portez un gilet pare-balles... Blague à part, l’envahissement se fait plutôt en pantoufles. Comme disait l’humoriste Yvon Deschamps : «Les Chinois y causent pas de trouble. Y font pas de bruit, on les entend pas marcher, pis y parlent pas.»

L’Occident a fait son temps
Depuis 100 ans, les projecteurs mondiaux sont braqués sur les États-Unis et l’Europe. Et si l’avenir de la planète dépendait plutôt de ce qui se passe présentement en Asie? Bien des journalistes, historiens et analystes ont tendance à croire que l’histoire du monde s’écrit en Occident et que le reste de la planète est spectateur. Ce n’est pas l’avis de l’historien français Pierre Grosser, spécialiste des relations internationales à Sciences Po-Paris. Dans son livre L’histoire du monde se fait en Asie : Une autre vision du XXe siècle (Odile Jacob), il rappelle la centralité de ce continent dans l’histoire mondiale du XXe siècle. Une position qui continue de s’affermir, au point que d’ici 20 ou 30 ans l’Europe et l’Amérique pourraient n’être que de simples périphéries. Et la question, dit-il, «est de savoir si la “transition” d’une hégémonie à une autre peut être pacifique».
(Jocelyn Coulon, L’actualité | 10.11.2017)  

Extraits de l’introduction que vous pouvez lire en entier (site de l’éditeur) :

L’importance de l’Asie aujourd’hui

L’Asie joue un rôle important, si ce n’est déterminant, dans le monde du XXIe siècle. Les «tournées» internationales des chefs d’État chinois (Xi Jinping) et indien (Narendra Modi) sont observées à la loupe, tandis que les visites à Washington font partie des plus commentées dans le milieu des experts aux États-Unis. La Chine achète des clubs de football européens et attire à prix d’or des stars du ballon rond dans ses propres équipes. L’Amérique s’inquiète des investissements chinois dans les studios à Hollywood et de l’autocensure des cinéastes qui veulent séduire les producteurs chinois et diffuser leurs films en Chine. Le groupe ChemChina vient de mettre la main sur le géant suisse de l’agrochimie Syngenta, ce qui en fait un des seuls poids lourds du secteur, pouvant concurrencer Bayer et Monsanto, qui dès lors sont sur la voie de la fusion. La Chine est en train de dépasser les États-Unis dans le domaine des supercalculateurs.

L’Asie, moteur de l’économie mondiale

En effet, l’Asie pèse de plus en plus lourd dans l’économie mondiale. Elle compte plus de 4 milliards d’habitants sur une population mondiale de 7 milliards. Décrite comme le continent de la misère rurale dans les années 1960, elle apparaît aujourd’hui comme celui de la modernité et du dynamisme urbains. Si de larges poches de pauvreté demeurent, c’est en Asie qu’elles ont diminué le plus, et le plus rapidement. L’Asie-Pacifique compte désormais davantage de millionnaires que l’Amérique du Nord. Pékin a sous doute dépassé New York pour le nombre de milliardaires, et Shanghai a certainement dépassé Londres. Les classes moyennes chinoises et indiennes sont plus nombreuses que la classe moyenne américaine. Les 165 milliards de dollars qu’ont dépensés les touristes chinois en 2014 font rêver le monde entier – et notamment la France. Pesant 5 % de la population américaine, les Asiatiques sont la minorité qui augmente le plus vite aux États-Unis depuis 2000 et qui est globalement la plus riche, malgré des inégalités sociales encore plus importantes que parmi les Blancs.
    La Chine est devenue «l’usine du monde», accusée de détruire, par la concurrence qu’elle impose, des emplois ailleurs, notamment aux États-Unis, tout en gravissant à marche accélérée les échelles de l’innovation technologique. Donald Trump, élu président des États-Unis en novembre 2016, affirme «qu’il ne faut plus laisser la Chine violer notre pays.» [...] Son succès aux élections de novembre 2016 est fortement lié à ce défi chinois, à la crainte qu’il suscite et à ses conséquences sur l’économie et la société américaines.
     Des firmes chinoises et indiennes rejoignent, et parfois dépassent, les japonaises et les sud-coréennes en haut du classement des plus grandes entreprises multinationales. La croissance chinoise pèse, selon les années, pour un quart, voire un tiers de la croissance mondiale. La Chine est la première puissance commerciale du monde, avec un excédent colossal. Les huit plus grands ports à containers sont situés en Asie orientale. La Chine est le premier ou second partenaire commercial de la plupart des pays du G20, et figure dans le trio de tête des partenaires commerciaux de tous les pays du monde. Les entreprises étrangères qui y sont implantées génèrent plus de 40 % de ses exportations (60 % il y a dix ans). C’est avec la Chine que les Américains ont leur plus important déficit commercial, d’autant qu’ils y exportent deux fois moins que vers le Mexique. [...]
    [...] En 2013, la Chine est devenue le premier importateur mondial de pétrole. Les échanges intra-asiatiques s’accroissent plus vite que le commerce mondial : la Chine est désormais le premier partenaire de la plupart de ses voisins asiatiques, et devient pour eux un marché tout aussi important que ceux de l’Occident.
    La Chine se transforme également en une puissance financière. Elle détient encore 10 % de la dette américaine et les plus fortes réserves de devises et d’or du monde (malgré une baisse en 2015), et devient une source importante d’investissements directs à l’étranger (plus de 200 milliards de dollars en 2016, cent fois plus qu’il y a dix ans), majoritairement en Asie, mais de plus en plus en Amérique du Nord, et surtout en Europe où elle peut jouer de la concurrence entre les États. Elle est désormais le premier investisseur en Amérique latine. [...]

Les grandes puissances «pivotent» vers l’Asie, qui pivote vers le monde

Le monde entier semble dès lors «pivoter» vers l’Asie, pour reprendre un terme stratégique utilisé par l’administration Obama, tandis que l’Asie pivote vers le monde. Comme elle est le moteur de la croissance mondiale, il ne faut pas être exclu, et il faut tirer parti de ses capacités industrielles, commerciales et financières. Des délégations d’États, de provinces et de villes s’y pressent, notamment en Chine. Des entreprises du monde entier cherchent à s’y implanter, malgré les contraintes administratives et politiques, et parfois la corruption. Les pays européens font assaut d’amabilités en Chine, tandis que les dignitaires chinois sont accueillis en grande pompe. [...]

28 novembre 2017

Un monde à la merci de dépravés

Capitalisme sauvage : surproduction, surconsommation, gaspillage et esclavage.

Comme en fait foi le récent reportage de CNN, des migrants de pays subsahéliens cherchant à se rendre en Europe via la Libye sont interceptés et vendus aux enchères dans ce pays de l’Afrique du Nord.
   Dans un centre de rétention pour migrants, à Tripoli, CNN a rencontré des migrants en attente d’expulsion vers leur pays d’origine. L’un d’entre eux, un jeune Nigérian nommé Victory, explique, face caméra, qu’il a été vendu lors d’une enchère aux esclaves. Le jeune homme de 21 ans avait fui son pays, avec toutes ses économies, pour essayer d’atteindre l’Europe. Il raconte avoir été détenu dans des conditions déplorables, privé de nourriture et maltraité par ses ravisseurs. «Si vous demandez à la plupart des gens ici, si vous regardez leurs corps, vous verrez les marques, ils ont été battus, mutilés.»


Selon la Fondation Walk Free environ 45 millions de personnes seraient maintenues en «esclavage moderne» dans le monde en 2016, dont la moitié environ en Inde, en Chine et au Pakistan. Walk Free https://www.walkfreefoundation.org/

L'esclave est une personne non libre, un bien, une marchandise, un instrument économique pouvant être vendu ou acheté.  

Quelques constantes permettent de dresser un premier contour de ce que l'on désigne par «esclavage moderne», il est notamment (mais pas exclusivement) caractérisé par :

le travail forcé, sous la menace de sévices corporels ou psychologiques;
une relation de propriété ou de quasi-propriété d'un esclave par un «employeur», où l'esclave est maintenu dans cette relation de dépendance par des sévices, ou des menaces de sévices, corporels ou psychologiques;
une déshumanisation de l'esclave qui n'est plus traité comme un être humain, mais comme une marchandise, et acheté ou vendu comme tel;
des entraves physiques ou une liberté de mouvement restreinte.

La traite des êtres humains peut servir à alimenter des filières de prostitution dans le monde entier : on estime à 2 millions le nombre d'esclaves prostitués en Thaïlande, pour répondre notamment aux besoins du tourisme. La traite sert également à alimenter des ateliers de production et des activités économiques, ainsi en Afrique de l'Ouest, des enfants sont recrutés pour du travail dans des conditions d'exploitation, et sont ainsi transportés clandestinement dans l'ensemble de la région. En Chine et au Vietnam, des femmes sont emmenées dans des îles du Pacifique pour y travailler dans des ateliers clandestins à la fabrication de produits destinés au marché nord américain. Au Mexique, des hommes font l'objet de traite et sont emmenés aux États-Unis pour y travailler dans des exploitations agricoles.

Les enfants sont des victimes importantes des traites contemporaines, aussi bien pour être exploités comme travailleurs que comme esclaves sexuels. Selon le BIT et Interpol on peut distinguer 5 grands courants internationaux d'enfants destinés à la prostitution : de l'Amérique Latine vers l'Europe et le Moyen-Orient; d'Asie du Sud et du Sud-Est vers l'Europe du Nord et le Moyen-Orient; de l'Europe vers le monde arabe; d'Afrique noire vers l'Europe, le Canada et le Moyen-Orient; et enfin le trafic transfrontalier à l'intérieur de l'Europe.

Malgré les progrès incontestables en matière de textes légaux ou de conventions internationales, les situations d'asservissement restent nombreuses dans le monde. L'Organisation des Nations unies (et ses institutions spécialisées que sont le Bureau international du travail et L'Organisation internationale du travail) estime qu'il y aurait aujourd'hui 200 à 250 millions d'esclaves adultes à travers le monde auxquels s'ajouteraient 250 à 300 millions d'enfants de 5 à 14 ans au travail. Ces chiffres recouvrent toutefois des situations très diverses dans le monde.

À voir, ne serait-ce que pour l'odieuse et humiliante vente à l’enchère du début : 

BOIS D'EBENE (2) : VENTE DES ESCLAVES ET VIE DANS LA PLANTATION
Bois d'ébène» est un documentaire-fiction de Moussa Touré, diffusé le 10 mai 2016 sur France 2. Il décrit le temps de la traite négrière et de l'esclavage dans les Antilles françaises, en tenant compte des avancées de la recherche historique sur ce thème. Il s'appuie sur de nombreuses archives réelles : récits d'esclaves, carnets de bord des capitaines de bateaux négriers, lettres d'armateurs propriétaires de ces bateaux... Les colonies françaises seront jusqu'en 1848 l'un des derniers bastions de la traite négrière entre l'Afrique et les Amériques.(...)



Dansant avec les Noirs
Pablo Neruda

Noirs du continent, au Nouveau Monde
vous avez donné le sel qui lui manquait :
sans les Noirs les tambours ne respirent pas
et sans des Noirs les guitares ne sonnent pas.

Immobile était notre verte Amérique
jusqu'à ce qu'elle ne bouge comme une palme
lorsque d'un couple noir est née la
danse du sang et de la grâce.

Et après avoir subi tant de misères
et avoir coupé jusqu'à mourir la canne
et avoir gardé les porcs dans le bois
et avoir chargé les pierres les plus lourdes
et avoir lavé des pyramides de linge
et avoir grimpé, chargés, les échelles
et avoir enfanté, seule, sur le chemin
et n’avoir ni assiette ni cuillère
et avoir touché plus de coups que salaire
et avoir subi la vente de la sœur
et avoir moulu farine tout un siècle
et avoir mangé un jour à la semaine
et avoir couru tel un cheval toujours
répartissant des caisses d'espadrilles,
manipulant le balai et la scie,
et creusant des chemins et des montagnes,
se coucher fatigués, avec la mort,
et vivre de nouveau chaque matin
chantant comme personne ne chanterait,
chantant avec le corps et avec l'âme.

Mon cœur, pour dire cela, en moi
se scindent la vie et la parole et je ne
puis continuer parce que je préfère
partir avec les palmes africaines,
marraines de la musique terrestre
qui m'incite dès lors depuis la fenêtre :
et je m’en vais danser par les chemins
avec mes frères noirs de La Havane.

(Canción de gesta, 1960; traduction de Mélina Cariz)  

26 novembre 2017

Mensonge et sarcasme

Le mensonge contient les mêmes éléments hostiles que le sarcasme. La «victime» se sent stupide, ridiculisée à ses propres yeux et aux yeux des autres, parce qu’elle n’a pas su détecter le mensonge.


Intéressant d’entendre les remarques ironiques de l’ex-premier ministre Jean Charest au congrès du PLQ.
    L’UPAC mène toujours une enquête sur le financement du Parti libéral du Québec (PLQ) sous l’ère Charest. Aucune accusation n’a été portée contre l’ex-premier ministre.
    Selon M. Charest, des informations le concernant ont été «coulées» aux journalistes, qui les auraient «montées en épingle».  «L’UPAC a beaucoup de pression [...] une pression terrible de la part des médias. Dans certains cas, j’ai vu des reportages sur des affaires ou des déplacements que j’aurais faits, que je ne connaissais pas, qui n’ont jamais été faits, en présumant et en présentant ça comme quelque chose de grave. C’est vraiment gonflé à l’hélium. On présente des affaires comme si c’était très grave.»
(ICI Radio-Canada info)

Il aurait pu ajouter : «Hé, vous ne me pognerez pas, mon père est plus fort que la police!»

«Mentons, mentons, on finira bien un jour par dire par hasard une quelconque vérité.» ~ Serge Bouchard (Le mensonge, De la fin du mâle, de l'emballage et autres lieux communs, Éd. Boréal)

Ce que je trouve le plus ardu c’est de déterminer quand un menteur pathologique dit la vérité... puisque ça lui arrive parfois.

Il me fait donc plaisir de partager ces quelques conseils du psychologue Jack Schafer, auteur, analyste comportemental, conférencier et ex-agent du FBI.
http://www.words-talk.com/

Cinq choses que les menteurs répondent souvent quand on les interroge. On ne devrait pas les ignorer.  

Détecter le mensonge à l'aide d'indices verbaux reste une tâche difficile. La meilleure méthode pour prédire une tromperie consiste à comparer ce que dit la personne à une preuve externe ou à une vérité connue. Au mieux, certaines déclarations peuvent indiquer une plus grande probabilité de supercherie, mais il n'existe pas de signal verbal unique pouvant la prédire avec exactitude.

Cependant, dans un contexte donné, certains mots ou groupes de mots peuvent signaler qu’une tromperie est susceptible de se produire. Si la conversation est importante, savoir où réside la tromperie potentielle peut certainement avantager, à la fois dans les relations d’affaires et les interactions sociales.

Les cinq énoncés suivants méritent un drapeau rouge.

1. «C'est à peu près tout.»
La locution «à peu près» (presque) signifie que l'interlocuteur pourrait en dire davantage, mais qu’il ne veut pas donner plus de détails. S’il racontait toute l'histoire, sa réponse serait «C'est tout». La personne qui veut tromper ne divulguera pas certains aspects de l’histoire. Les honnêtes gens rapportent tous les faits sans crainte des conséquences juridiques ou sociales.

2. «Vous ne pouvez pas prouver ça.»
Le mot «prouver» suggère qu'il existe des faits pouvant confirmer l'hypothèse ou l'accusation que l’interrogateur n'a pas encore réussi à découvrir. Les gens malhonnêtes savent qu’il y a des preuves. Les honnêtes gens ne pensent pas en termes de preuves : ils savent qu'il n’y a pas de preuves puisqu’ils n’ont pas fait ce dont on les accuse.

3. «Pourquoi je ferais ça?»
Répondre à une question par une question est un énorme drapeau rouge indiquant une possible tromperie. Les gens malhonnêtes sont évasifs, et lorsqu'ils sont pris au dépourvu, ils ont besoin de temps pour trouver une répartie crédible. La réponse «Pourquoi je ferais ça?» leur fait gagner du temps. Les honnêtes gens démentissent tout de suite en répondant simplement «Je n'ai pas fait ça».

4. «Êtes-vous en train de m'accuser?»
En plus de répondre à une question par une question, l'accusé peut subtilement, essayer de retourner la situation en mettant l'interrogateur sur la défensive. Ces mots sous-entendent : «Comment osez-vous m'accuser? Soyez prêt à vous défendre vous-même!» Cette contre-attaque subtile pousse l'interrogateur à justifier ses accusations. Ce faisant, l'accusé gagne du temps pour contre-attaquer ou préparer une histoire crédible. La réponse simple à cette question serait : «Oui, je vous accuse, sinon je n'aurais même pas abordé le sujet». Cette réponse pare la contre-attaque et remet l'accusé sur la défensive.

5. «Je ne me souviens pas avoir fait ça.»
Pour camoufler la vérité, les gens malhonnêtes prétendent manquer de mémoire. Cette défense comprend deux pièges pour les dissimulateurs :
    En premier lieu, pour ne pas se souvenir de ce qu’on a fait, il faut d'abord qu’il existe un souvenir de l'événement. Par définition, ne pas se rappeler de quelque chose suppose que toutes les informations ont d'abord été stockées dans la mémoire. Le manque de mémoire indique que le souvenir est stocké dans le cerveau, mais que la personne ne peut pas le récupérer. Habituellement, les honnêtes gens répondent : «Je ne sais pas», car si la personne n’arrive pas à récupérer le souvenir, par conséquent elle ne sait pas ce qui est arrivé. Les honnêtes gens font tout ce qu'ils peuvent pour récupérer le souvenir d'un événement. Les gens malhonnêtes ne veulent pas se souvenir de peur de dévoiler des informations qui exposeraient la vérité.
    Le deuxième piège est similaire. Une personne ne peut pas dire, «je ne me souviens pas avoir fait ça», sans se rappeler ce qu'elle a réellement fait. Le mot «ça» suggère que la personne ne se rappelle pas avoir fait un ensemble d'actions. Pour dire «je n'ai pas fait ça», la personne doit savoir ce qu'elle a fait d’autre. Logiquement, comment une personne peut-elle dire qu'elle ne se souvient pas avoir fait une chose si elle n'a aucun souvenir de l'événement? Le mot «ça» indique qu’il y a un souvenir de l’événement.
    La réponse de l'interlocuteur  à cette manœuvre devrait être : «Vous souvenez-vous alors de ce que vous avez fait?» En général, les gens malhonnêtes s'accrochent au manque de mémoire en disant «Je ne sais pas ce que j'ai fait». Ici l'interlocuteur devrait dire : «Si vous ne savez pas ce que vous avez fait, il est donc possible que vous ayez fait exactement ce que j'ai décrit». Les gens malhonnêtes ne feront aucun effort pour récupérer le souvenir d'une action de peur de révéler la vérité. Les honnêtes gens vous diront ce dont ils se souviennent, conformément à leur alibi.

La clé pour détecter le mensonge est d'écouter attentivement ce que la personne vous dit. Les mots ne sortent pas de la bouche des gens sans raison. Ils ont un sens et sont une représentation directe de ce qu'une personne pense : les mots peuvent révéler l'imposture, et ils le font.

Source : Psychology Today

En complément :

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La science du mensonge



Comment le cerveau prend goût au mensonge
Par Lise Loumé

Des petits mensonges aux gros bobards, il n'y a qu'un pas et une région de notre cerveau nous incite à le franchir... Cette «spirale du mensonge» a été décryptée par des chercheurs britanniques.
    Raconter des petits mensonges de temps en temps, tout le monde (ou presque) le fait et cela peut paraître anodin. Sauf que sans le savoir, un cercle vicieux s'enclenche dans notre cerveau, car plus on ment, et plus cet organe «prend goût» au mensonge! Voilà comment l'on peut passer de petits mensonges de rien du tout à des plus gros qui permettent d'enfouir les précédents… Un mécanisme cérébral fascinant mis en évidence par des chercheurs en psychologie de l'University College de Londres (Grande-Bretagne) et détaillé dans la revue Nature Neuroscience.

Les émotions négatives liées au mensonge effacées par l'amygdale

Dans cette étude, les chercheurs ont demandé à 80 volontaires (âgés de 18 à 55 ans) de se prêter à un jeu, dans lequel ils peuvent mentir pour un enrichissement personnel, ou dire la vérité. Concrètement, ils se sont vus soumettre une photo haute résolution représentant un pot en verre rempli de pièces de monnaie. Par ordinateur, ils ont aidé un partenaire à estimer le montant d'argent contenu dans le récipient. Cette personne (en fait un acteur) ne dispose pour sa part que d'une photo de médiocre qualité. Dans un premier scénario, les opérateurs ont demandé aux participants d'estimer de la façon la plus exacte possible le montant, en leur disant que cela bénéficierait à la fois à eux-mêmes et à leur partenaire (ils gagneraient tous les deux davantage d'argent). Puis les participants ont été soumis à d'autres scénarios, dans lesquels sous-estimer ou surestimer volontairement le montant contenu dans le pot pouvait présenter un intérêt pour eux, au détriment de leur partenaire, ou bien l'inverse, ou encore profiter aux deux...
    L'expérience montre que les gens mentent davantage quand c'est positif pour eux-mêmes et pour les autres, «probablement parce que cela ne les fait pas se sentir mal», relèvent les chercheurs. Mais au fil de l'exercice, la plupart des volontaires se sont mis à déformer la réalité... Pour comprendre pourquoi, les chercheurs ont scanné le cerveau des volontaires pendant tout la durée de l'expérience. Verdict : une zone du cerveau responsable de la mémoire émotionnelle, l’amygdale, s'active lors du premier mensonge, et de plus en plus au fur et à mesure que le participant ment...

Des petits mensonges qui font «boule de neige» avec le temps

En fait, au début de l'expérience, le menteur ressent un inconfort lorsqu'il déforme la vérité. Mais cette gêne s'estompe à mesure que la liste de ses mensonges s'allonge, l'amygdale du cerveau qui gère certaines de nos émotions s'étant en quelque sorte accoutumée. Et les mensonges se font de plus en plus gros... «Il y a une sorte d'adaptation émotionnelle, pointent les chercheurs. Cela peut conduire à une «pente glissante», lorsque de petits arrangements avec la vérité peuvent déclencher une escalade et devenir des mensonges importants». Un effet «boule de neige» évoqué par des «menteurs» ou tricheurs «que ce soit dans le cas d'une infidélité, d'un dopage dans le sport, de données scientifiques trafiquées ou de fraude fiscale», soulignent les scientifiques.
    «C'est la première fois que l'on montre de manière empirique qu'un comportement malhonnête s'accroît à mesure qu'il se répète», affirme dans un communiqué Neil Garret, principal auteur de l'étude. Pour lui, ces résultats confortent l'idée que l'amygdale pourrait «réagir à des actes que nous considérons mauvais ou immoraux». «Nous avons testé uniquement les comportements malhonnêtes dans cette expérience. Mais le même principe pourrait s'appliquer à d'autres processus d'escalade, comme les comportements à risque et violents», estime-t-il.


Citation du jour :

[...] je crois que si le mensonge peut servir un moment, il est nécessairement nuisible à la longue, et qu'au contraire la vérité sert nécessairement à la longue bien qu'il puisse arriver qu'elle nuise dans le moment. D'où je serai tenté de conclure que l'homme de génie qui décrie une erreur générale, ou qui accrédite une grande vérité, est toujours un être digne de notre vénération. ~ Denis Diderot (Le neveu de Rameau)

Les journalistes d'enquête et leurs sources ont de ce fait toute mon admiration car ils contribuent à révéler les actes frauduleux, loin d'être anodins, qui entachent notre système politique. On peut leur dire grand merci.

23 novembre 2017

Jeu politico-économique et piraterie

«Pour être certain de gagner, inventez votre propre jeu, et ne révélez jamais les règles aux autres joueurs.» ~ Ashleigh Brilliant

Les Greed Papers nous enseignent que le Décret 863-96 ne s’applique pas à tous...

«Tout est privilège concédé par l’État : votre voiture, votre maison, votre profession, bref votre vie; et ce que l’état donne, il peut le reprendre si vous n’êtes pas un contribuable docile.» ~ Pierre-André Paré
[Ex-sous-ministre au Ministère du Revenu du Québec (Décret 863-96, 10 juillet 1996) devant une commission de l’Assemblée Nationale. Rapporté par Le Devoir, le 6 avril 1996.]

Si par malheur une famille vit sous le seuil de la pauvreté, eh bien selon la logique de ce deal (à la Reagan/Thatcher/Trump), «votre vie est un privilège concédé par l’État [qu’il peut reprendre]». En effet, on laisse les pauvres crever de faim.

À Montréal en 2015 :

Se loger ou se nourrir

Photo : Jacques Nadeau | Le Devoir.

À Montréal, près de 41% des locataires (soit 210 000 ménages) affectent désormais plus de 30% de leurs revenus à leur loyer. Quatre ménages montréalais sur dix engouffrent plus du tiers de leurs revenus pour payer leur loyer, un problème qui a obligé l’an dernier près de 50 000 ménages locataires à se priver de nourriture en quantité ou en qualité suffisantes.
Isabelle Paré :

Les bas de Noël du ministre québécois des Finances Carlos Leitão sont-ils réellement des «cadeaux»? 

Pour mieux comprendre les maths du deal, lisez les billets de Gérald Fillion, journaliste spécialisé en économie et animateur de l’émission RDI Économie.

Photo : Armée du salut Canada

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Les appels des députés (et les vôtres) à la merci de l'espionnage
Par Brigitte Bureau et Sylvie Robillard d'Enquête
22 Novembre 2017 | ICI Radio-Canada nouvelles

[Quelques extraits]  

Des failles de sécurité dans les principaux réseaux de téléphonie mobile au pays rendent les Canadiens vulnérables à l'espionnage et à la fraude. Les conversations téléphoniques d'un député ont pu facilement être interceptées et ses mouvements suivis à la trace, démontrent des tests effectués pour Enquête.

Les enjeux de sécurité font partie du quotidien de Matthew Dubé. Ce député néodémocrate du Québec est porte-parole en matière de sécurité publique et vice-président du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
   Il a accepté que l'on essaie d'intercepter ses communications. Sa seule demande : acheter un nouveau téléphone qu'il utiliserait avec des gens seulement au cours de l'expérience.
   Cela dit, il soutient que son téléphone de député n'est muni d'aucun dispositif de sécurité spécial et qu'il n'a jamais été informé des failles de sécurité que l'on voulait tester.
   Ce que les fournisseurs de services téléphoniques et les agences fédérales ne disent pas aux utilisateurs, c'est que tous les appareils reposent sur un système de trafic téléphonique qui, lui, est à la merci des pirates informatiques. Il s'agit du système de signalisation numéro 7 – ou, plus simplement, SS7.
   Pour mener cette expérience, Radio-Canada est allée rencontrer des pirates informatiques en Allemagne.
   Karsten Nohl et Luca Melette, de l'entreprise Security Research Labs à Berlin, sont des spécialistes des failles dans les réseaux de téléphonie mobile. Ces ingénieurs en informatique pratiquent ce qu'on appelle dans le milieu le «piratage éthique». Pour le compte de grandes sociétés, ils tentent de déceler les brèches qui pourraient être exploitées par des criminels.
   Le député Dubé fait remarquer que l'une des conversations que le pirate a interceptée s'est déroulée tout près de la Chambre des communes… et du bureau de Justin Trudeau. «Pour les gens qui ne connaissent pas le parlement, j'étais physiquement un étage en bas du bureau du premier ministre. C'est quelque chose.»
   C'est avec stupeur que le député Dubé constate la précision avec laquelle le pirate allemand a pu suivre ses moindres déplacements.
   Même des informations en apparence anodines peuvent servir aux malfaiteurs, explique-t-il. «Tout le monde a des petits secrets, des choses à cacher. [...] L'information privée peut être utilisée de façon malicieuse pour extorsion, donc forcer un politicien à agir d'une certaine manière.»
   «Comparativement à d'autres réseaux en Europe et ailleurs dans le monde, les réseaux canadiens sont faciles à pirater.» ~ Karsten Nohl, ingénieur en informatique

De simples citoyens aussi victimes
Il n'y a pas que la classe politique qui est vulnérable aux failles du SS7 dans le système de téléphonie mobile. Plus tôt cette année, de simples citoyens ont appris à la dure qu'ils pouvaient aussi en être victimes. En se levant un matin, des clients de la compagnie de téléphonie allemande O2-Telefonica ont découvert que leur compte en banque avait été vidé.  
   «Ça donne des frissons dans le dos. On a perdu le contrôle totalement sur le système de téléphonie international. C'est épeurant.» ~ Pierre Roberge, cyberexpert


Le cybercrime est un business lucratif, et les pirates peuvent se servir à volonté au bar ouvert Wifi. Mais, il existe aussi des «pirates éthiques» qui enseignent aux individus et aux entrepreneurs à se garer des intrusions. Comme le mentionne l’auteur de l'article (Maurits Martijn, De Correspondent; octobre 2014) on ne le répétera jamais assez : ne vous branchez pas sur les réseaux Wifi des espaces publics sans protection adéquate.    
   Lisez l’expérience menée aux Pays-Bas. Vider les comptes bancaires des usagers du Wifi est un jeu d’enfant à la portée de n’importe qui. Il n’est même pas nécessaire d’avoir des connaissances élaborées en informatique pour réussir : «Nous avons amené un pirate dans un café et, en 20 minutes, il savait où chaque client était né, quels collèges il avait fréquentés et les cinq dernières choses qu'il avait googlées.»


«La technologie des médias a parfois une influence catastrophique. Si elle répond seulement aux besoins des multinationales et des politiciens corrompus, elle peut créer des réalités faussées, totalement artificielles. Les fusions d’entreprises se multiplient; elles contrôlent de plus en plus la technologie et utilisent la publicité pour influencer la manière de penser du public.
   Plus grave encore est le problème du pouvoir politique et de la surveillance des citoyens, y compris dans les pays démocratiques. Sous prétexte de lutter contre les trafiquants de drogue et les terroristes, les États empiètent de plus en plus sur la vie privée de leurs habitants. Cette tendance vers une autorité centrale, dans un monde virtuel high-tech coupé de la nature, un monde où l’eau, la nourriture et les autres éléments essentiels de la vie quotidienne sont banalisés et dénaturés conduit à un désastre.
   En Occident, chaque individu croit qu’il peut être son propre maître. Eh bien, si c’était vrai jadis, aujourd’hui, dans un monde hautement technicisé où une arme tenant dans une simple valise peut détruire une ville entière, une telle philosophie est inapplicable. L’humanité ne survivra pas à ce genre de liberté.» ~ James Redfield   

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“The only moment that you can live here comfortably in these absolutely irreconcilable conflicts is in this moment when you embrace it all and you say ‘Look, I don’t understand a fucking thing at all – Hallelujah!’” ~ Leonard Cohen

“There is a crack, a crack in everything. That’s how the light gets in.” (L.C., Anthem)

19 novembre 2017

Croyez-vous au maintien de la paix?

Question simpliste : pouvons-nous maintenir une chose qui n’existe pas?!  

«La guerre... Peut-être les peuples ont-ils besoin de ces cauchemars. Ils saccagent ce qu'ils ont mis des siècles à construire. On détruit ce que l'on interdisait. On favorise ce que jadis on condamnait. La guerre, c'est une grande main qui balaie le monde. C'est le lieu où triomphe le médiocre, le criminel reçoit l'auréole du saint, on se prosterne devant lui, on l'acclame, on l'adule. Faut-il donc que la vie paraisse aux hommes d'une si lugubre monotonie pour qu'ils désirent ainsi le massacre et la ruine? Je les ai vus bondir au bord du gouffre, cheminer sur son arête et regarder avec fascination l'horreur du vide dans lequel s'agitaient les plus viles passions. Détruire! Violer! Égorger!»
~ Philippe Claudel (Le rapport de Brodeck; Stock, 2007)   

Collage : Who You Fighting For; Joe Webb http://www.joewebbart.com/   

Crevaison

chez les pauvres
on ne décide pas
on ne décède pas
on crève

on crève
comme des chiens
on crève
comme des pneus
avec un son
de gun
dans la nuit.

~ Patrice Desbiens (En temps et lieux 2, éd. L'Oie de Cravan, 2008)

Dernier receuil : Sous un ciel couleur cayenne
Éditeur : Prise de parole | Collection : Poésie | Paru le 13 novembre 2017

Mots de Patrice Desbiens choisis/lus par David Goudreault (1) à Dessine-moi un dimanche (ICI Radio-Canada Première, 19.11.2017) : 

ne pas oublier
d’éteindre la télévision
d’éteindre l’ordinateur
d’éteindre toutes les lumières
et d’étreindre les étoiles  

À quoi sert d’être brillant si t’éclaires personne?

Croyez-vous qu’il faut augmenter la production d’énergies fossiles?


(1) David Goudreault (né le 26 août 1980 à Trois-Rivières au Québec) est écrivain, romancier, poète, dramaturge et performeur québécois. Il est le premier québécois à remporter la Coupe du monde de poésie, en juin 2011 à Paris. Travailleur social, diplômé de l'Université de Sherbrooke en 2004, il a spécialisé sa pratique en intervention auprès des groupes vulnérables, utilisant la poésie comme outil d'expression et d'émancipation.

Le réchauffement du climatoscepticisme 
David Goudreault | La Tribune | 4 novembre 2017

«Le concept de réchauffement climatique a été créé par et pour les Chinois dans le but de rendre l’industrie américaine non compétitive.» Donald Trump

CHRONIQUE / J’ai le privilège d’être suivi par des lecteurs brillants, des lectrices d’une intelligence remarquable, mais chaque semaine entraîne aussi son lot d’obscurantistes, de misogynes et de gardiens de la vertu en tous genres. Ils m’envoient des messages plus distrayants les uns que les autres. Des climatosceptiques enragés se sont ajoutés à cette belle bande de réactionnaires dans les derniers jours. J’ai découvert la susceptibilité des rébarbatifs du bac brun, l’intransigeance des militants de la pollution décomplexée. Jean-Pierre m’accuse même de relayer les mensonges de Greenpeace et de nuire à l’économie du Canada! Jean-Pierre accorde beaucoup trop de pouvoir à mes chroniques…
     Mon dernier papier exposait les chiffres troublants révélés par l’Agence européenne pour l’environnement et la revue scientifique The Lancet : la pollution cause 9 millions de morts par années, 5 millions pour la pollution atmosphérique seulement. Ce constat n’est pas le résultat de statistiques obtenues avec un échantillon restreint dans le cadre d’une recherche menée par des stagiaires neurasthéniques en réinsertion sociale, ce sont des nombres absolus! Ces données scientifiques rapportées dans une revue médicale laissent pourtant certains individus perplexes. De furieux sceptiques m’écrivent carrément que ces chiffres n’ont aucune valeur et qu’on fait dire ce que l’on veut aux statistiques.
     Comme Donald, président de la première puissance mondiale, pays pollueur à l’empreinte écologique tout aussi indélébile qu’exceptionnelle, de nombreux Québécois rejettent l’idée que l’activité humaine puisse avoir un impact sur le climat. Même si 98 % des scientifiques le reconnaissent! La sortie publique de l’Organisation météorologique mondiale nous mettant en garde contre «une hausse dangereuse de la température» suite à l’évaluation des taux de dioxyde de carbone de 2016, les plus élevés depuis 800 000 ans, n’y pourra rien. La corrélation directe entre l’industrialisation, son apogée moderne grâce à la mondialisation des marchés, et le réchauffement climatique n’est pas recevable. L’incontestable montée en flèche du niveau de CO2 dévoilée lundi dernier les laissera de glace. Une glace qu’aucun réchauffement appréhendé ne fera fondre.
     Mais je ne veux pas m’inquiéter davantage sur la pollution ou le réchauffement climatique, j’y consacre déjà une large part de mon existence; c’est l’ignorance qui m’inquiète aujourd’hui. La mienne, d’abord (j’ignorais l’ampleur du désastre intellectuel dans lequel nous baignons).

Et celles des climatosceptiques aussi...

Près de la moitié des Québécois souffriraient d’analphabétisme plus ou moins fonctionnel. Le nombre doit exploser comme les ventes de VUS si on parle d’innumérisme, cette incapacité à maîtriser les nombres, les calculs et les raisonnements en découlant. Il faut reconnaître que certains chiffres sont vertigineux. Des exemples? La perte de masse de la calotte de glace en Antarctique représente en moyenne 7,8 millions de litres par seconde, les émissions de tétrachlorure de carbone continuent à augmenter malgré leur interdiction et atteignent 39 000 tonnes par an soit 1,24 kilo par seconde. J’en passe et des meilleures. Ceci explique peut-être cela : l’incapacité de lire, comprendre et analyser l’information nous empêche de faire confiance aux données scientifiques.
     À qui profite le crime? Aux pollueurs, évidemment! Moins les populations sont informées, moins elles se mobilisent; plus on peut polluer en paix, privatiser les profits et externaliser les coûts sociaux et environnementaux. Certains gouvernements aussi en bénéficient, il est plus facile de se faire élire sur des campagnes de peur ou des mensonges sans fondements que d’établir un programme cohérent. Et de s’y tenir!
     Le scepticisme en question ici découle peut-être d’un mécanisme de défense. Le doute est confortable, mais le confort se précarise à vue d’œil. Alors qu’il faudrait une mise en action massive et mondiale, on s’obstine encore sur la pertinence de la mobilisation. Si l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des catastrophes naturelles à l’échelle planétaire ne peut convaincre les climatosceptiques; si les données scientifiques et les preuves empiriques ne suffisent pas à démontrer l’évidence, rien ne le pourra. Nous sommes foutus. Le règne de l’opinion creuse propulsera d’autres Donald au pouvoir. Le pétrole coulera à flots, la déforestation et la désertification suivront leurs cours, l’acidification des océans s’accélérera et les millions de morts liés à la pollution crèveront en vain. Mais nous consommerons en paix.
     Peut-être que je me trompe, peut-être que Jean-Pierre et les climatosceptiques ont raison, je ne suis qu’un exalté de la gogauche colportant les fausses statistiques d’un complot écologiste ourdi par les services secrets chinois… Si tel est le cas, c’est déjà assez déprimant, ne m’écrivez pas pour m’insulter en plus. Si vous le faites quand même, prenez le temps d’accorder vos participes passés. Merci!


An Open Letter From 800+ Scientists To President-Elect Donald Trump On Climate Change

Canada's most shameful environmental secret must not remain hidden
‘Tar sands have been dubbed the largest (and most destructive) industrial project in human history.’ And Canada is on the forefront or their exploitation.
Tzeporah Berman | The Guardian | Tuesday 14 November

17 novembre 2017

La débandade des harceleurs sexuels

Refus : Les refus appartiennent à différents degrés sur une échelle de valeur décroissante : le refus formel, le refus conditionnel, le refus timide et le refus féminin. Par certains casuistes, ce dernier est également appelé le refus consentant. ~ Ambrose Bierce (Le dictionnaire du Diable)

Hum... les charmants partys de bureau à l’horizon!
Image : Anne Taintor Inc.

«Donner un nom, c'est risquer un procès pour diffamation, qui a infiniment plus de chances d'aboutir à une condamnation que des poursuites pour viol, s'indigne l'artiste Mirion Malle. Le système tout entier est fait pour effrayer et dissuader les femmes de parler.» Commando culotte, le blog de Mirion Malle :
http://www.mirionmalle.com/2016/09/limpunite-des-hommes-celebres.html

40% des victimes de harcèlement sexuel au travail ayant dénoncé leur harceleur ont perdu leur emploi. Prise au piège; photo Getty Images / Stockphoto (Source l’express.fr)

«Par harcèlement sur le lieu du travail, il faut entendre toute conduite abusive se manifestant notamment par des comportements, des paroles, des actes, des gestes, des écrits, pouvant porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychique d’une personne, mettre en péril l’emploi de celle-ci ou dégrader le climat de travail.
   Le harcèlement sexuel n’est qu’un pas de plus dans le harcèlement moral. Il concerne les deux sexes mais la plupart des cas décrits ou plaidés concernent des femmes agressées par des hommes, le plus souvent leur supérieur hiérarchique.
   Il ne s’agit pas tant d’obtenir des faveurs de nature sexuelle que de marquer son pouvoir de considérer la femme comme son objet (sexuel). Une femme harcelée sexuellement est considérée par son agresseur comme étant «à disposition». Elle doit accepter, et devrait même être flattée, se sentir rehaussée, d’avoir été «choisie» (1). Le harceleur n’envisage pas que la femme convoitée puisse dire non. D’ailleurs, si elle le fait, elle subit en retour des humiliations et des agressions. Il n’est pas rare que l’agresseur dise que c’est elle qui l’a aguiché, qu’elle était consentante ou demandeuse.
   Différents types de harceleurs ont été décrits – tous ayant en commun un idéal de rôle masculin dominant et des attitudes négatives envers les femmes et le féminisme – et différentes catégories de harcèlement sexuel, identifiées :
- le harcèlement de genre, qui consiste à traiter une femme différemment parce qu’elle est une femme, avec des remarques ou des comportements sexistes;
- le chantage sexuel (le seul à être effectivement réprimé en France);
- l’attention sexuelle non désirée;
- l’imposition sexuelle;
- l’assaut sexuel.»
~ Marie-France Hirigoyen, psychiatre (Le harcèlement moral, la violence perverse au quotidien; Pocket 1998)

(1) Le juge Jean-Paul Braun, de la Cour du Québec, a tenu des propos similaires en octobre dernier lors d’un procès pour agression sexuelle – voyez «SexLeak : un problème de taille à  résoudre», 28 octobre 2017.

L’ampleur du mouvement de dénonciation actuel peut certainement aider à contrecarrer le bal des vampires – «excusez-moi, mais vos dents sont dans mon cou». Et puis, il existe plusieurs écoles qui offrent des cours 101 d’autodéfense partout au Québec – ce n’est pas un luxe de nos jours!


7 mythes courants concernant l’autodéfense pour femmes
Je ne suis pas assez forte! Je ne suis pas assez en forme! Les arts martiaux, c’est pour les hommes! L’autodéfense, c’est pour les batailleurs! L’autodéfense rend violent et je n’aime pas la violence! Cela n’arrive qu’aux autres! J’ai passé l’âge! Avez-vous déjà pensé ou dit l’un de ces énoncés? Alors lisez ce qui suit…

Le CRAN des femmes

Agression? Harcèlement? Délais? Un avocat-criminaliste fait le point
Le 19 octobre 2017 | Gravel le matin | ICI Radio-Canada Première

En marge des allégations d'inconduites sexuelles ciblant l'animateur et producteur Éric Salvail et l'homme d'affaires Gilbert Rozon, l'avocat-criminaliste Me Walid Hijazi différencie les différents types d'accusations et précise qu'il n'y a pas de délais pour porter plainte et déposer des accusations criminelles.
   Si auparavant, le Code criminel différenciait le viol, l’attentat à la pudeur et l’attouchement, l’ensemble de ces gestes sont maintenant considérés comme une agression sexuelle : «La plupart des gestes allégués constitueraient une agression sexuelle. Un attouchement, un simple toucher à connotation sexuelle sans le consentement de la personne qui reçoit ce toucher est une agression sexuelle
   Me Walid Hijazi souligne que le harcèlement n’a pas nécessairement une connotation sexuelle : «Il s’agit de communications répétitives qui, dans la répétition, deviennent envahissantes et menaçantes [pour la victime].»

Délai maximal?
Me Walid Hijazi note qu’en droit criminel, il n’y a aucune limite temporelle pour déposer des accusations. Il ajoute toutefois que le temps qui passe peut avoir des répercussions sur la qualité de la preuve recueillie et présentée au tribunal : «Plus le temps avance, plus la qualité de la preuve se perd. La mémoire est une faculté qui oublie. Il y a des gens qui ne se souviennent plus ce qui s’est passé, il y a des gens qui disparaissent. [...] [Il faut être en mesure de colliger une] preuve qui amènerait un procureur à avoir la conviction morale qu’il sera en mesure de convaincre un juge et un jury hors de tout doute raisonnable.»
   L’avocat rappelle qu’au Canada, l’accusé est présumé innocent jusqu’à preuve du contraire.

«Selon les enquêtes menées par les associations, les femmes qui s’en sortent le mieux sont celles qui ont pu aller jusqu’au bout d’une démarche juridique. Or, quand il s’agit de violence psychologique, c’est impossible puisqu’il n’y a pas de traces, pas de preuves, et que les victimes sont difficilement crues. Dans ce cas, le travail de reconstruction est plus long, c’est comme si la brèche restait ouverte.» ~ Marie-France Hirigoyen, psychiatre (Femmes sous emprise; Pocket 2005)

Allégation 101, par un avocat-criminaliste
Plus on est de fous, plus on lit | Le 10 avril 2017 | ICI Radio-Canada Première

«Une allégation, c'est l'action de citer un fait, une autorité ou un texte comme preuve de ce que l'on affirme pour s'en prévaloir», explique Walid Hijazi. À l'heure où les allégations et rumeurs se transforment trop vite en faits lorsque la machine virale s'en mêle, l'avocat-criminaliste vient remettre les pendules à l'heure.

Un mot à double tranchant
Walid Hijazi explique que ce mot spécifique au vocabulaire juridique correspond à une proposition que l’on avance et que l’on défend comme vraie, en tant qu’avocat. Dans son métier, pour convaincre la cour, il peut lancer ce terme à son adversaire pour que les allégations de son confrère soient considérées comme «de l’ordre du fantasme».

Un terme qui se déplace
Selon l’avocat-criminaliste, si la justice est généralement associée à la cour d’un point de vue historique, les réseaux sociaux font que le tribunal semble changer de plateforme. «Le tribunal de l’opinion populaire est très fort», poursuit-il. Les géants du web semblent s’emparer désormais du problème pour que la vérité soit valorisée avant la popularité dans le référencement.
   Pour Walid Hijazi, les «faits alternatifs» sont des allégations parmi d'autres. Sans preuve, on essaie de nous convaincre par tous les moyens, et les conséquences peuvent être dévastatrices. «Les allégations non démontrées peuvent être meurtrières.»

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L’affaire Gerry Sklavounos / Alice Paquet est un bon exemple de cul-de-sac parole de l’un contre celle de l’autre (les agresseurs agissent rarement devant témoin), avec en toile de fond la notion de consentement telle que décrite par Ambrose Bierce : le refus féminin est un refus consentant.

Février 2017 : Le député de Laurier-Dorion Gerry Sklavounos a fait une déclaration en compagnie de sa femme, comme exigé par le premier ministre [Philippe Couillard] pour réintégrer le caucus libéral après avoir été blanchi des allégations d’agressions sexuelles qui pesaient sur lui. Il s'est excusé pour des tentatives de «socialisation» qui auraient pu être mal interprétées. «J'ai peut-être essayé d'être "friendly", charmeur en faisant un compliment honnête et poli. Mais je réalise maintenant que ce n'était pas approprié dans un milieu de travail», juge-t-il. Il refuse de préciser de quels gestes il dit s'excuser. «J'ai pu faire des blagues, je suis passionné, donc spontané. Ç'a été un véritable enfer pour ma famille et moi», avait-il affirmé. (Le Journal de Québec | 9 février 2017)

À l’entendre, on aurait cru que c’était lui la victime. L’homme a une réputation de harceleur à l'Assemblée nationale. On ne saura pas ce qui s’est réellement passé entre Alice et Gerry. Néanmoins, les intentions du député ne semblaient pas aussi équivoques que le refus consentant de la plaignante. Mais, le summum de l’indécence, de la méchanceté, fut d’exiger la présence de son épouse au point de presse – une humiliation publique d’un cynisme insupportable. Sur la plupart des photos publiées dans les médias on pouvait lire sur le visage de cette femme, le malaise, le désarroi, le doute, peut-être la honte et le sentiment d’avoir été flouée pendant des années.

Photo : ICI Radio-Canada