19 février 2015

Fin de «Situation planétaire»

Illustration : Zach Terrell, Good night, Sleep tight

Après quatre tentatives de capitulation ratées, je rends enfin les armes. À la dernière, en juin 2013, j’écrivais : «... Avec pareil thème, il était difficile de passer à côté des aberrantes décisions géopolitiques et socioéconomiques, et autres barbaries mondiales qui taraudent notre quotidien. Mais là, la coupe déborde. ...»

Eh bien, c’était comme avec les résolutions du Nouvel An, je succombais à chaque fois qu’une mauvaise nouvelle en rapport avec notre qualité de vie (air, eau et nourriture) sapait ma sérénité. Par exemple, aujourd’hui, le passe-droit en faveur de la compagnie Ciment McInnis m'a renversée. L’installation à Port-Daniel-Gascons est une voie directe vers une culmination en matière de pollution : «La cimenterie pourrait émettre 1,76 million de tonnes de GES si elle atteint sa production maximale de 2,2 millions de tonnes de ciment par année». Pour quelque 200 à 400 emplois locaux... et sans aucune redevance à la municipalité. Un coup de maître à la Frank Underwood (House of Cards). High five!


Alors voilà, je cesse de compter les drapeaux rouges et les cadeaux empoisonnés, car c’est sans fin. En outre, je ne crois même plus qu’un quelconque changement d’orientation puisse stopper la foudroyante gangrène du fanatisme, tant économique qu’idéologique, répandue sur tous les continents. La terre est de plus en plus inhospitalière et les refuges dignes de ce nom disparaissent à la même vitesse que les espèces. Enfin, je n’ai plus envie de déplorer notre abyssale stupidité collective qui a précipité la planète dans ce colossal bourbier. 

«Le remarquable développement de l’intelligence humaine s’est accompagné de la faculté de s’aveugler volontairement devant la réalité. Une colonie de fourmis, une bande d’oiseaux migrateurs ou une meute de loups ne se comporte jamais de façon ‘stupide’ et ne prend pas de décision qui nuit de toute évidence à leur survie ou à celle de leur espèce. La ‘stupidité est le propre de l’homme’, et mon intention en disant cela n’est pas d’offenser les humains mais de les inciter à davantage de bon sens. 
   Il y a deux langues distinctes maintenant – le langage de l'économie et le langage de l'écologie – et elles ne convergent pas.»
   ~ Manfred Max-Neef, économiste et environnementaliste

Hugo doit se revirer dans sa tombe : 
«Tous les gouvernements ont de tout temps violé tous les droits, à commencer par le droit des gens. Les canons s'appelaient l'ultima ratio. Qui a force a droit, voilà quelle était la maxime; les petits états dévorés par les grands; les poules mangées par les renards, les renards mangés par les loups, les loups mangés par les lions, voilà quelle était la pratique. Ce qui est une nouveauté, c'est le respect du droit. Ceci est l'honneur de la civilisation du XIXe siècle de vouloir que le faible soit respecté par le fort, et que la morale éternelle soit au-dessus des piques et des mousquets.» 
   ~ Victor Hugo

Je laisse le blogue ouvert à la consultation et répondrai aux commentaires s’il y a lieu.

Encore une fois donc, merci à tous les visiteurs assidus...

Si vous me cherchez, vous me trouverez la tête dans le sable (non bitumineux) à :
http://artdanstout.blogspot.ca/ 

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Derniers rappels  

Si vous dormez au chaud, d’autres crèvent de froid dans la rue.
 
Si vous mangez à satiété (et plus!), d’autres crèvent de faim.

18 février 2015

L'abîme entre nous se creuse

Après avoir feuilleté ce livre en librairie, je l’ai acheté, convaincue qu’il pouvait éclairer ma lanterne. Ce fut le cas.

(Photographe inconnu)

Résumé
L’ex-diplomate canadien Robert Fowler, et son collègue Louis Guay, ont été kidnappés en décembre 2008 par des membres d’Al-Qaïda et libérés en avril 2009. Le récit est captivant et se lit comme suspense. Quatre mois sous la surveillance de brutes imprévisibles (24/24), avec une épée de Damoclès (un vrai sabre en fait) suspendu au-dessus de la tête, et dans des conditions de vie physique et psychologique extrêmement difficiles au cœur du Sahara. Ce page-turner constitue non seulement un témoignage de première main, mais aussi une réflexion d’une grande pertinence sur la confrontation entre les démocraties occidentales et le fondamentalisme islamiste violent, et l’état d’un monde secoué par le choc des civilisations. 

La version originale (en anglais) a été publiée en 2011. Le 3e appendice comporte une mise à jour datée de juin 2013 car depuis 2011 plusieurs événements d’envergure reliés au sujet ont perturbé le monde politique. Malheureusement, quand on observe ce qui se passe en ce moment même, on se rend bien compte que «ce n’est pas un fossé qui se creuse entre nous, mais un abîme» d’incompréhension.

Notes de lecture

MA SAISON EN ENFER
130 jours de captivité aux mains d’Al-Qaïda
Robert R. FOWLER
Traduit par Nicole et Émile Martel
Québec Amérique, 2013

L’aspect sans doute le plus révélateur et le plus dérangeant, à mes yeux, des croyances de nos ravisseurs était leur relation au temps. Elle soulignait le fossé qui existe entre eux et nous et prouvait sans l’ombre d’un doute que Samuel Huntington était bien plus près de la vérité que de nombreux analystes n’ont voulu le reconnaître dans son article qui a fait école, «Le choc des civilisations», paru dans Foreign Affairs en 1993. J’ai dîné un soir avec le professeur Huntington en 1999 lors d’une retraire organisée par le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, pour le Conseil de Sécurité, et je me suis rappelé que j’avais trouvé sa thèse – selon laquelle les conflits futurs seraient basés sur des différences religieuses et culturelles plutôt que des intérêts économiques et stratégiques – alarmiste, simpliste et un peu xénophobe. Tandis que je poursuivais mes discussions avec nos kidnappeurs d’Al-Qaïda, cependant, et que j’en apprenais davantage au sujet de leurs croyances et de l’intensité qu’ils y mettaient, j’ai commencé à développer plus d’affinité pour la vision de Huntington sur l’inévitable choc des civilisations, ou à tout le moins la certitude d’un affrontement grandissant entre l’islam fondamentaliste et les valeurs et intérêts occidentaux. J’étais en train de vivre cet affrontement. 
       L’absence totale d’importance du temps aux yeux de nos ravisseurs était un obstacle culturel auquel j’ai eu du mal à m’habituer. Le temps est l’ennemi des sociétés occidentales. Nous voulons tout, tout de suite, et nous ne sommes pas prêts à attendre. Avec combativité, nous sommes déterminés à ignorer les impératifs de la réalité temporelle (l’âge, la santé, l’éducation, les livres, la nourriture, les journaux, la personnalité, l’amitié, la prudence, la confiance, l’ancienneté professionnelle, la politique) en faveur du divertissement – la satisfaction et l’action immédiates, même si elles sont superficielles et éphémères – plutôt que la connaissance, l’appréciation et la compréhension obtenues plus tard. Elle est très dérangeante, la conviction profonde de nos ravisseurs qu’ils avaient le temps pour eux, comparée à notre inconstante dépendance des gratifications d’un cycle d’information médiatique chaque fois plus court, plus mince et plus tyrannique, et à notre besoin d’une satisfaction immédiate dans tous nos projets. 
       Mes ravisseurs d’AQMI [Al-Qaïda au Maghreb islamique] se moquaient bien qu’il fallût encore 20 ans, 200 ans ou 2000 ans pour que leur vision se réalise. Ils étaient en cela parfaitement sereins. Ils acceptaient de gagner certaines batailles et d’en perdre d’autres, quel que soit le temps requis, mais ils savaient avec une inébranlable certitude et une totale clarté que la victoire d’Allah serait la leur. C’était écrit. Le quand n’importait pas. Voilà une arme bien puissante à tous égards.
       Le temps, dans ce bas monde, ne comptait pour rien. Par bonheur, ils ne comprennent que partiellement à quel point il compte pour nous, mais ils apprennent vite. Ils ne s’attendent pas à emporter la victoire de leur vivant, puisqu’ils espèrent que leur vie sera courte et qu’elle se terminera dans la gloire en accomplissant la mission que Dieu leur a donnée. Peu importe de nombre de générations de moudjahidines à la vie brève qu’il faudra. Si le fait de dévier de leur voie entraînait de passer en enfer 50 000 années de torture raffinée et calculée, quelle différence feraient quelques siècles?
[...]
       La compréhension qu’avaient les djihadistes d’AQMI de la réalité de la vie en Occident était fragmentaire – pleine de mythes convenus et entretenus au sujet de notre débauche, de notre vie sans dieu, de notre décadence. Ils en comprenaient cependant assez de notre société et de nos politiques distraites et brouillonnes pour savoir que nous n’avions pas le cœur assez fort pour une bataille de longue haleine, lourde de victimes, coûteuse, intense, brutale et sans merci. Tout particulièrement, bien sûr, une bataille visant des objectifs qui de toute évidence ne touchaient pas nos intérêts vitaux et qui semblaient pour le moins abstraits et opaques au plus grand nombre de nos citoyens. Nos ravisseurs tiraient, et je suis sûr qu’ils tirent encore, une grande force de cette compréhension, tout comme ils aiment beaucoup jouer le David de notre Goliath occidental en Irak et en Afghanistan; leur statut et leur poids presque partout dans le monde continue de grandir alors que nous nous fourvoyons encore et encore. 
       Ils méprisent la plupart de nos concepts et de nos croyances les plus chères.
[...]
       Ils détestaient les mots liberté et droit, croyant qu’il s’agissait là de principes pernicieux, contraires aux visées d’Allah, des idées qui détournaient immanquablement du droit chemin des hommes bons qui craignaient Allah. Une stricte discipline islamique devait dicter la routine de leurs journées, imposée par un dieu possessif, sans merci et vengeur. Comment pouvions-nous, réitéraient-ils encore et encore, trouver barbare l’application raisonnable de punitions sanctionnées par la charia (lapidation et amputation) quand on les comparait aux atrocités et indignités qui avaient cours dans les prisons surpeuplées d’Occident? 
       Ils détestaient tout concept qui pouvait porter le nom de droits de l’homme, gardant un mépris tout particulier envers la Déclaration universelle des droits de l’homme, qu’ils voyaient comme rien de moins qu’une arme à peine camouflée par l’Occident dans sa croisade contre l’islam. Ils insistaient pour dire que tous les droits appartenaient à Dieu et que c’était L’insulter que de prétendre connaître Ses intentions. 
       Et alors, qu’aimaient-ils? Qu’est-ce qui les distrayait, à quoi prenaient-ils plaisir? Eh bien, à part l’islam, rien. Ils n’avaient pas la permission de chanter, mais il leur arrivait de s’asseoir, parfois en plein soleil, et de psalmodier des versets du Coran pendant des heures entières, joints de temps en temps par un ou deux frères qui venaient joindre leur voix à ces chants monotones. (...) 
       Ayatollah Khomeiny a dit : «Allah n’a pas créé l’homme pour qu’il ait du plaisir. Le but de la création visait à ce que l’humanité soit mise à l’épreuve grâce à des peines et à la prière. Un régime islamique doit être sérieux en tout. Il n’y a pas de blagues dans l’islam. Il n’y a pas d’humour dans l’islam. Il n’y a pas de plaisir dans l’islam. Il ne peut y avoir ni plaisir ni joie dans ce qui est sérieux.» Nos ravisseurs d’AQMI n’auraient pas sollicité l’appui de ce sombre ecclésiastique chiite, mais ils vivaient entièrement ses principes.
[...]
        Tout en insistant vivement sur la vacuité de nos valeurs impies, l’hypocrisie de notre pensée politique et le caractère injustifié de la mort et de la destruction que nous semions avec autant d’insouciance dans le monde, ils manifestaient une admiration étonnée devant la supériorité technologique et l’esprit d’invention de l’Occident, armes qu’ils menaçaient d’utiliser contre nous. Ils cherchaient (plutôt désespérément, je dirais) à faire de la simplicité ou de l’ancienneté de leurs armes et de leur équipement une qualité en disant souvent : «Nous espérons que les Américains viendront dans le Sahara car alors, leurs armes sophistiquées ne les protégeront pas de la colère d’Allah.»
[...]
       (...) Nos ravisseurs réagissaient avec agressivité face à la participation canadienne à la coalition présente en Afghanistan, mais c’était la situation à Gaza qui les préoccupait le plus. Pendant que l’acharnement se poursuivait, ils devenaient plus nerveux et instables, et j’ai commencé à désespérer de notre avenir, qui s’annonçait bref et effrayant. Ils avaient en tête des endroits où ils voulaient aller pour tuer des gens, et nous n’étions qu’une distraction qui les éloignait de leur destin. Ils nous en détestaient d’autant plus. 
(p. 191-196)

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Ceci ne constitue pas du tout un fatras de données visant à exagérer la menace, non plus qu’un plaidoyer en faveur d’une augmentation des budgets militaires. C’est plutôt que de tels troubles sont tout simplement un danger réel et actuel, comme les récentes attaques au Nigeria l’ont prouvé de façon indéniable. Tôt en 2011, AQMI a émis un communiqué accordant son appui, des armes et de l’entraînement aux forces de Boko Haram (dont le nom peut être traduit ainsi : «l’enseignement occidental est dangereux »), une violente secte djihadiste qui opère dans tout le nord du Nigeria.
(p. 364)

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Au sujet du «syndrome de Stockholm» : J’ai bien peur de donner une réponse simple et sans nuance. L’écart entre eux (ce qu’ils sont et qui ils sont) et moi – entre leurs croyances, leur méthodes, leurs buts, d’une part, et les miens d’autre part – était tout simplement trop grand pour permettre la moindre cordialité ou empathie. ...
[...] Comment aurions-nous pu établir des liens amicaux avec un fanatique enragé qui bavait presque de rage lors d’une discussion sur les Nations Unies, quand il parlait plein d’espoir d’endosser «la veste du martyr», le chahîd, pour assister à une réunion de délégués internationaux discutant des droits des femmes et de l’égalité entre les sexes?
[...]
       On me demande parfois comment cette expérience a changé ma vision de l’existence. (...) Comme c’est peut-être devenu plus qu’évident, j’ai à présent peu de patience pour la correction politique et les ronds de jambe oratoires. Je suis écoeuré de constater à quel point nos vies contemporaines souffrent d’un déficit d’attention, répondent à des priorités sans valeur et subissent les conséquences des rodomontades de politiciens sans vision, de médias superficiels et de notre immense ignorance de l’histoire et du monde qui nous entoure. Eh oui, je suis devenu un homme bougon. 
       (...) Maintenant, il s’agit surtout de consacrer du temps de choix à ma famille et à de proches amis. Je doute que j’aurais aussi bien compris cela sans l’expérience impitoyable que j’ai vécue. Je sais avec une étonnante confiance que chaque jour est un présent, qu’il doit être traité comme tel, et célébré sans crainte, triomphalement.
(p. 365-367)

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Le fanatisme vu par :

Voltaire (1694-1778); Dictionnaire philosophique :

- Le fanatisme est à la superstition ce que le transport est à la fièvre, ce que la rage est à la colère. Celui qui a des extases, des visions, qui prend des songes pour des réalités, et ses imaginations pour des prophéties, est un enthousiaste; celui qui soutient sa folie par le meurtre, est un fanatique.

- Les lois sont encore très impuissantes contre ces accès de rage; c'est comme si vous lisiez un arrêt du conseil à un frénétique. Ces gens-là sont persuadés que l'esprit saint qui les pénètre est au-dessus des lois, que leur enthousiasme est la seule loi qu'ils doivent entendre. Que répondre à un homme qui vous dit qu'il aime mieux obéir à Dieu qu'aux hommes, et qui, en conséquence, est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant?

- Ce sont d'ordinaire les fripons qui conduisent les fanatiques, et qui mettent le poignard entre leurs mains; ils ressemblent à ce Vieux de la Montagne qui faisait, dit-on, goûter les joies du paradis à des imbéciles, et qui leur promettait une éternité de ces plaisirs dont il leur avait donné un avant-goût, à condition qu'ils iraient assassiner tous ceux qu'il leur nommerait.

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Georges Darien (1862-1921) :
C'est le fanatisme de la liberté, seul, qui peut avoir raison du fanatisme de la servitude et de la superstition.

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André Frossard (1915-1995); Les Pensées :
On parle toujours de ‘fanatisme aveugle’, comme s'il y avait des fanatismes clairvoyants.

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Source des citations : http://bribes.org/lexique.htm

13 février 2015

Au nom de l’amour

Ce que les humains ont commis (et commettent) «au nom de l’amour» est aussi horrifiant que ce qu’ils ont commis (et commettent) «au nom de dieu».


Henri  Laborit* a formidablement décrit notre façon de nous servir de l’«amour» pour masquer des desseins qui en sont totalement dépourvus :

«Avec ce mot on explique tout, on pardonne tout, on valide tout, parce que l'on ne cherche jamais à savoir ce qu'il contient. C'est le mot de passe qui permet d'ouvrir les coeurs, les sexes, les sacristies et les communautés humaines. Il couvre d'un voile prétendument désintéressé, voire transcendant, la recherche de la dominance et le prétendu instinct de propriété. 
   C'est un mot qui ment à longueur de journée et ce mensonge est accepté, la larme à l'oeil, sans discussion, par tous les hommes. Il fournit une tunique honorable à l'assassin, à la mère de famille, au prêtre, aux militaires, aux bourreaux, aux inquisiteurs, aux hommes politiques. Celui qui oserait le mettre à nu, le dépouiller jusqu'à son slip des préjugés qui le recouvrent, n'est pas considéré comme lucide, mais comme cynique
   Il donne bonne conscience, sans gros efforts, ni gros risques, à tout l'inconscient biologique. Il déculpabilise, car pour que les groupes sociaux survivent, c'est-à-dire maintiennent leurs structures hiérarchiques, les règles de la dominance, il faut que les motivations profondes de tous les actes humains soient ignorés. 
   Leur connaissance, leur mise à nu, conduirait à la révolte des dominés, à la contestation des structures hiérarchiques. Le mot d'amour se trouve là pour motiver la soumission, pour transfigurer le principe du plaisir, l'assouvissement de la dominance.» (Éloge de la fuite) [Les passages en gras sont de mon initiative]

«Il y a des milliers d'années que périodiquement on nous parle de l'amour qui doit sauver le monde. C'est un mot qui se trouve en contradiction avec l'activité des systèmes nerveux en situation sociale. Il n'est prononcé d'ailleurs que par des dominants culpabilisés par leur bien-être et qui devinent la haine des dominés, ou par des dominés qui se sont brisé les os contre la froide indifférence des dominances. 
   Il n'existe pas d'aire cérébrale de l'amour. C'est regrettable. Il n'existe qu'un faisceau du plaisir, un faisceau de la réaction agressive ou de fuite devant la punition et la douleur et un système inhibiteur de l'action motrice quand celle-ci s'est montrée inefficace. Et l'inhibition globale de tous ces mécanismes aboutit non à l'amour mais à l'indifférence.» (Éloge de la fuite)

«Tant qu'on n'aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l'utilisent, et tant que l'on n'aura pas dit que jusqu'ici cela a toujours été pour dominer l'autre, il y a peu de chance qu'il y ait quoi que ce soit qui change.» (Mon oncle d'Amérique)

* (1914-1995) Chirurgien, neurobiologiste, éthologue et philosophe.

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Citations du jour :

«Une des conséquences positives de l'amour est la vanité. Tous les efforts qu'on fait pour attirer l'attention de l'autre et qui nous améliorent. L'amour est un chantage. Pour notre bien, parfois.» ~ Charles Dantzig 

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«L'amour est aveugle. La preuve, en le faisant il y a des gens qui braillent.»
~ Jean Yanne

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«Si l'amour rend aveugle... Le mariage redonne la vue!» (~ ?) 

Bonne Saint-Valentin... gratuite, sans nuances de gris! :-)  

12 février 2015

En toute sécurité chez soi

Au temps des cavernes
Voilà la fine pointe du système de sécurité. La technologie
n’est simplement pas très avancée encore.

En 2015
Maintenant vous êtes protégés contre les attaques terroristes.

Celle-là est vraiment trop comique :
   Plus on vieillit, plus on devient sage...
   Je me suis débranché du service de sécurité résidentiel et j’ai laissé tomber le groupe de surveillance de voisinage.
   J’ai planté des drapeaux pakistanais devant ma maison. Maintenant, la police locale, le FBI, la CIA, la NSA, le Département de la sécurité intérieure, les Services secrets, la Police Provinciale de l’Ontario, la GRC et d’autres agences surveillent ma maison 24/7.
   Je ne me suis jamais senti aussi bien protégé de ma vie et j’économise 49,95 $ par mois.
   (Auteur inconnu)

Si vous voyez quelqu’un qui porte un camouflage,
assurez-vous de lui rentrer dedans pour qu'il sache que ça fonctionne.

7 février 2015

Patrimoine perdu : les rivières sous les villes

J'ai publié ce message en juillet dernier, et vu les bris d'aqueducs en ce moment à Montréal, le revoici.

Documentaire Rivières perdues (voyez la description sous les photos)

Libérer les rivières souterraines enfouies sous nos déserts de béton citadins, voilà un projet révolutionnaire en matière d’environnement. Si les glaciers continuent de fondre aussi rapidement, ce serait un moyen de composer avec les changements géophysiques qui se produiront. On a beau essayer de contrôler et d’enclaver l’eau, quand vient la fonte des neiges ou lors de pluies torrentielles (de plus en plus fréquentes et abondantes) les égouts refoulent.
       Au lieu de continuer à multiplier les buildings et les parcs à condos (le béton n’absorbe pas l’eau), il vaudrait mieux laisser les rivières sous-terraines circuler, et créer des espaces verts-éponges tout autour. Ramener les rivières à la lumière favorise l’intégration d’écosystèmes, de milieux humides, qui absorbent le surplus d’eau et revitalisent les grandes villes. Une manière aussi de compenser les îlots de chaleur. On en voit des exemples extraordinaires dans ce documentaire. Et la nature s’ajuste très rapidement – plus que nous à vrai dire, puisque nous avons le cerveau dans le béton. À noter que 50% de la population mondiale vit dans les grandes villes.
       L’on prétexte qu’il en coûterait trop cher, pourtant, des investisseurs «visionnaires» et audacieux ont décidé de réaliser ces projets avant-gardistes. «Quand on ne sait pas ce qui a été fait ailleurs, on continue d’agir de la même manière», dit une urbaniste.

Alors si M. Coderre souhaite remettre (ou garder...) la ville sur la «map» (sic), il devrait s’inspirer de ce documentaire, d’autant plus que Montréal est une île et que si jamais ça débordait pour vrai, on n’ose imaginer ce qui s’ensuivrait. Et puis, beaucoup d’emplois en perspective, notamment pour les entreprises d’ingénierie et de construction.

Photo : Olivier Pontbriand (La Presse); Montréal 29 mai 2012


À propos de Rivières perdues

"Autrefois, dans pratiquement toutes les villes industrielles coulaient d'innombrables rivières. Les maisons s'érigeaient le long de leurs berges. Les routes embrassaient leurs courbes. Et leur courant permettait d'alimenter moulins et usines. Mais, au fur et à mesure que les villes grandissaient, la pollution envahissait les rivières à tel point qu'elles sont devenues de vrais canaux pour des maladies mortelles telles que le choléra, l'équivalent au XIXe siècle de la peste noire. Alors la solution a été d'enfouir les rivières sous terre et de les fondre aux réseaux d'égout.

Aujourd'hui, sous la ville, elles continuent de couler, hors de la vue et des préoccupations de ses habitants … du moins jusqu'à maintenant. En effet, des citadins se sont lancés dans une quête pour se réapproprier leur environnement naturel. Rivières perdues nous entraîne dans une aventure souterraine, aux quatre coins du monde, en compagnie d'explorateurs urbains clandestins, pour reconstituer l'histoire de ces rivières urbaines perdues, notamment grâce à des cartes d'archives. Nous partons à la recherche de cours d'eau disparus comme la petite rivière Saint-Pierre à Montréal, le ruisseau Garrison à Toronto, la rivière Tyburn à Londres, la rivière Saw Mill à New York, et la rivière Bova-Celato à Brescia, en Italie. Y a-t-il des chances que nous puissions un jour revoir ces rivières? Pour trouver la réponse, nous rencontrerons des penseurs urbains visionnaires, des activistes et des artistes du monde entier."  

À voir si vous avez accès à la zone (si encore disponible) :
http://ici.tou.tv/zone-doc

Bande-annonce :
http://rivieresperdues.radio-canada.ca/
Ou
http://vimeo.com/69162900

Site des producteurs :
http://www.catbirdproductions.ca/about/?lang=fr

COMMENTAIRE

Récemment en allant chez un ami que je n’avais pas vu depuis longtemps, j’ai été stupéfaite de voir l’immense îlot de verdure de son quartier (dans une ville de taille moyenne) presque complètement déboisé. Pas un seul arbre là où l’on avait rasé. «Ils ont commencé l’abattage à l’automne dernier, et puis au printemps, coupe à blanc et érection de ces affreuses constructions bétonnées, collées les unes aux autres – à enjolivures style ‘sino-rococo'. Et ils vont tout abattre ce qui reste…», me disait-il. Il songe à vendre sa propriété.  
       Alors, qu’est-il arrivé à la faune qui logeait et nidifiait dans ce grand écosystème?! Pourquoi s’étonner de voir des chats sauvages et des faons à nos portes puisqu’ils n’ont plus d’endroits où vivre. La construction de nids pour les animaux humains (d’ailleurs l’espèce la plus envahissante – ex aequo avec les fourmis) gruge de plus en plus de terrain vierge. Le jour où il n’y aura plus que du béton, des dépotoirs et des humains (et plus d’arbres pour nous les à respirer), eh bien, souhaitons-nous bonne chance…

6 février 2015

ADDENDA "La mort choisie"

Addenda 6 février 2015

Enfin, victoire de la compassion et de l’intelligence sur la cruauté!  

La Cour suprême du Canada invalide l'article du Code criminel qui interdit à un médecin d'aider quelqu'un à s'enlever la vie dans des circonstances bien précises.

Un texte de Denis Ferland (Grands titres, ICI Radio-Canada)

La Cour conclut que l'article actuel du Code criminel viole le droit à la vie, la liberté et la sécurité de certaines personnes par sa très large portée. Elle vise par son jugement les adultes considérés comme capables au sens de la loi, qui donnent clairement leur consentement et qui souffrent de manière persistante et intolérable à cause d'un problème de santé grave et irrémédiable.

Les gouvernements fédéral et provinciaux bénéficient d'un sursis de douze mois pour ajuster leurs législations s'ils le désirent.

(...)

Les tortionnaires "pro-vie" ne tarderont pas à récriminer contre l'aide à mourir dans la dignité...

5 février 2015

«La mort choisie»

Rétropédaler sur le droit de mourir dignement : un référendum S.V.P. !

Suicide assisté: la Cour suprême publiera un nouveau jugement vendredi
(...) ...la nouvelle cause qui occupe la Cour Suprême du Canada est celle de deux femmes de Colombie-Britannique atteintes de maladies incurables, Kay Carter et Gloria Taylor. Toutes deux sont maintenant décédées, mais l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique poursuit ses efforts pour faire reconnaître sa victoire à la Cour Suprême de leur province, qui a admis en 2012 que la loi contre le suicide assisté viole le droit des personnes gravement malades. Cette décision a ensuite été portée en appel, ce qui explique le jugement de vendredi [janvier février 2015]. (La Presse)

«Rares sont ceux qui vivent leur vie si intégralement que la mort ne représente aucune menace. La plupart des gens combattent la mort comme ils ont combattu la vie.» ~ S. Levine

(Voyez la vidéo du Dr François Damas à la fin)

J’ai reçu ce photomontage accompagné d’une brève description il y a quelques semaines. Croyant qu’il s’agissait d’un canular, je n’ai pas vérifié sur le coup. Véridique ou non, je trouvais néanmoins l’idée extraordinaire. Je me disais que c’était peut-être le plus efficace des testaments biologiques imaginables. Qui pourrait contester la lucidité de mon choix? car il faut être conscient pour consentir à se faire tatouer... Puisque la question du suicide assisté revient sur le tapis, j’ai cherché et trouvé divers reportages britanniques au sujet de ce tatouage (2011).


Voici un résumé. 

Le tatouage de Joy Tomkins

Joy Tomkins, âgée de 81 ans, s’est fait tatouer «NE PAS RÉANIMER» sur la poitrine, et «PTO» (Please Turn Over – SVP Retourner) sur le dos parce qu’elle voulait que les médecins la laissent mourir si elle tombait gravement malade et perdait conscience.

Même si elle avait un testament biologique depuis 30 ans, elle considérait que le tatouage assurerait le respect de sa volonté de ne pas être réanimée en salle d’urgence : «Le tatouage est visible immédiatement... aucune excuse pour ignorer ce que je veux, pour faire une erreur. Si on me trouve inconsciente et que je ne peux rien dire, je veux que les ambulanciers sachent et acceptent d’agir selon ma volonté.»

L’ancienne secrétaire de direction ne veut pas «faire son lit et se laver» pendant encore 20 ans. Elle souffre d’arthrite, de diabète et de la maladie de Raynaud. Elle dit que plusieurs choses clochent et qu’elle n’a plus l’énergie pour pratiquer ses hobbies préférés, tels que jouer du piano et jardiner, mais qu’elle a toute sa tête. «Qu’est-ce que je vais faire si je vis jusqu’à 100 ans? Cette pensée m’horrifie. Ma belle-mère est morte à 106 ans mais il aurait mieux valu qu’elle ne vive pas les six dernières années de sa vie : elle était misérable.»

«Je suis plutôt heureuse de me réveiller le matin, mais si je ne me réveille pas je le serai tout autant. Je ne veux pas passer des heures, des mois, des années, couchée à attendre de mourir. Je ne veux pas que me famille se souvienne de moi comme d’un légume. Et mes enfants sont d’accord avec mon choix.»

Joy Tomkins dit avoir imité une infirmière, Frances Polack, qui à l’âge de 85 ans (en 2003) s’était fait tatouer ce message car elle craignait que le testament biologique qu’elle gardait sur elle ne soit pas consulté, et aussi pour éviter des problèmes à sa famille et aux médecins s’ils obéissaient à sa volonté. «Certaines personnes portent des bracelets, trimballent leur testament biologique dans leur portefeuille ou leur bourse. Mais le personnel paramédical ne s’occupe généralement pas de trouver ce genre de notes, et comme il s’agit d’une urgence, ils vont tout faire pour vous réanimer sans que vous ayez donné votre accord.» 

Le porte-parole de Compassion in Dying dit que seulement 4% de la population connaît le testament biologique et porte un avis à cet effet. Il suggère que les gens en fournissent une copie à leur famille et au médecin traitant.


Selon Mme Tomkins, porter ce tatouage résulte d’une profonde inquiétude par rapport au droit de mourir, et devrait en faciliter le respect.

Le hic :
Le Dr Anna Smajdor, professeur en éthique médicale à East Anglia's Medical School disait comprendre que Mme Tomkins souhaitait livrer un «message très clair» et couvrir «toutes les possibilités» avec son tatouage. Cependant, selon elle, le tatouage ne peut pas être utilisé comme unique moyen pour faire respecter sa volonté car il n’a pas de «valeur légale contraignante».

Dans la même veine :
Une femme originaire de la Colombie Britannique, Gillian Bennett, s’est enlevée la vie parce qu’elle ne voulait pas subir l’indignité de la démence. Elle a créé un site pour expliquer son parcours et son choix. Une femme extraordinaire, brillante, lucide, qui a pavé le chemin pour nous : http://deadatnoon.com/index.html

Résumé en français : http://situationplanetaire.blogspot.ca/2014/08/morte-midi.html

La mort choisie - Comprendre l'euthanasie et ses enjeux 
Dr François Damas   
http://www.editionsmardaga.com/mort-choisie

Le Dr François Damas à TED : un choix et un droit qui apportent apaisement et sérénité au patient et à l’entourage.



La véritable question demeure : si nous avons le droit de naître, pourquoi n’avons-nous pas le droit de mourir? (Voyez le libellé «Euthanasie»)

3 février 2015

Tout ce temps perdu!

Perdu en vains débats idéologiques, conflits et guerres alors qu’il y a tant à faire pour ressusciter notre planète à l’agonie.

Marguerite Yourcenar (1903-1987), lauréate du Prix Femina 1968 pour son roman L'Œuvre au Noir. Source photo : Rue des archives

Florilège :

[...] dans tout combat entre le fanatisme et le sens commun, ce dernier a rarement le dessus.
(Mémoires d'Hadrien, p.254, Folio n°921)

On n'est bien que libre, et cacher ses opinions est encore plus gênant que de couvrir sa peau.
(L'Œuvre au Noir, p.140, Folio n°798)

Magiques enfin l'amour, et la haine, qui impriment dans nos cerveaux l'image d'un être par lequel nous consentons à nous laisser hanter.
(L'Œuvre au Noir, p.378, Folio n°798)

Peu de bipèdes depuis Adam ont mérité le nom d'homme.
(L'Œuvre au Noir, p. 148, Folio n°798)

Nos recueils d'anecdotes sont pleins d'histoires de gourmets jetant leurs domestiques aux murènes, mais les crimes scandaleux et facilement punissables sont peu de chose au prix de milliers de monstruosités banales, journellement perpétrées par des gens de bien au coeur sec que personne ne songe à inquiéter.
(Mémoires d'Hadrien, p.140, Folio n°921)

Je vois une objection à tout effort pour améliorer la condition humaine : c'est que les hommes en sont peut-être indignes.
(Mémoires d'Hadrien, p.126, Folio n°921)

Je doute que toute la philosophie du monde parvienne à supprimer l'esclavage : on en changera tout au plus le nom.
(Mémoires d'Hadrien, p.129, Folio n°921)

Construire, c'est collaborer avec la terre : c'est mettre une marque humaine sur un paysage qui en sera modifié à jamais.
(Mémoires d'Hadrien, p.140, Folio n°921)

La morale est une convention privée; la décence est affaire publique; toute licence trop visible m'a toujours fait l'effet d'un étalage de mauvais aloi.
(Mémoires d'Hadrien, p.119, Folio n°921)

Source de la sélection : Au fil de mes lectures 
http://www.gilles-jobin.org/citations/index.php?page=accueil

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Matière à réflexion :

Gare de «Pékin», 1937 :
Tous les voyageurs sont tenus d’ouvrir leurs colis et de les soumettre à la fouille. Raison invoquée : la recherche d’opium et d’héroïne. Les principaux trafiquants sont des Japonais qui utilisent ce commerce pour affaiblir les populations qu’ils souhaitent conquérir. (p. 130)

En 1945 :
Le problème n’est pas simple car les Japonais ont bouleversé la carte politique de l’Asie : Hong-Kong, Singapour, l’Indochine, la Birmanie sont entre leurs mains. Avec la signature de la capitulation japonaise, le 15 août 1945, le monde retrouve la paix, mais la lutte reprend de plus belle en Chine entre nationalistes et communistes. (p. 144)

~ Alexandra David-Néel
(De Paris à Lhassa, de l’aventure à la sagesse)

2 février 2015

L’épouvantail à moineaux (tweets et autres)

Vraiment drôle ce cartoon (incapable de déchiffrer la signature malheureusement)

Surveillance électronique à tous crins : le paradoxe de la protection de la liberté via l’intrusion dans les données personnelles de tous les citoyens. Quelle aberration que Madame et Monsieur Tout-le-Monde soient privés de vie privée au nom de cette sacro-sainte protection.

Bien sûr, en business comme en toutes sortes de domaines publics, il est difficile désormais d’éviter internet. À la base, c’est un outil formidable – qui nous fait gagner du temps, mais aussi en perdre beaucoup, n’est-ce pas? Enfin.

Néanmoins, il est possible d’échapper à cet ogre qui bouffe tout ce que lui mettez volontairement dans la gueule. Donc, j’insiste encore une fois sur l’écriture à la main : pour les écrits importants, privés, confidentiels, optez pour la lettre manuscrite (non tapée à l’ordi, postée ou remise en main propre); même chose pour votre journal de bord. Si jamais le système flanche pour une raison ou une autre, vous ne perdrez rien. Et puis, si vous n’en voulez plus, vous pourrez les brûler : disparus sans laisser de traces! Bref, pas d’enregistrements sur votre disque dur ni sur les nuages immortels du cyberespace (n’importe qui peut rentrer dedans!). Aussi simple que ça; c’est peut-être archaïque, mais c’est sécuritaire. L’exercice pourrait rebuter les adeptes de la «selfisance» systématique.

Je comprends mieux pourquoi on insiste autant pour faire disparaître l’écriture manuscrite : impossible de surveiller, de créer des statistiques et de faire du harcèlement publicitaire avec ça.

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Les Canadiens inquiets pour la protection de leur vie privée
Au moment où on apprend que les données partagées en ligne par les internautes sont scrutées à la loupe par le Centre de la sécurité des télécommunications du Canada (CST), un nombre croissant de Canadiens se disent préoccupés de la protection de leur vie privée, selon un récent sondage. 
   Le sondage, mené en octobre et novembre 2014 pour le compte du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada, révèle que neuf répondants sur 10 se préoccupent de la protection de leur vie privée, un nombre qui a nettement augmenté depuis deux ans. (Grands titres, ICI Radio Canada)

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Dans la foulée des attentats récents à Paris, le premier ministre britannique, David Cameron, a évoqué la nécessité d'interdire des applications de discussions instantanées qui utilisent la cryptographie et dont le contenu ne peut être lu par les agences de renseignements. Une déclaration qui a fait bondir autant les défenseurs de la vie privée que le monde des affaires. (La Sphère, ICI Radio Canada Première, 24 janvier 2015)

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Facebook vous connaît mieux que vos parents et amis
(...) Selon lui, la capacité des ordinateurs à emmagasiner une grande quantité de données, et à y accéder facilement en tissant des liens rapides, expliquerait en partie la victoire de la machine sur l’humain lorsque vient le temps de tailler le portrait de quelqu’un sur la base d’informations partagées. Le jugement de la machine serait également renforcé par la froideur des algorithmes, ajoute-t-il, qui, contrairement au jugement humain, n’est pas teintée par des intentions et autres biais.
   À moins que ce ne soit l’aveuglement avec lequel l’humain se raconte, sans retenue et en détail, à toutes les machines qu’il a créées, qui permettrait désormais à ces mêmes machines de faire muter bien des choses, y compris un adage en  «dis moi ce que tu aimes sur Facebook et je te dirai qui tu es vraiment». (...)
(Fabien Deglise, Le Devoir, 13 janvier 2015) 


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«Le clic est le verrou de notre prison. Ce monde virtuel est une réelle trappe à souris. Euh, non… plutôt un collant à mouches. 
   Des individus pro-liberté se décarcassent pour concevoir des outils contre l’intrusion abusive. C’est louable, et on devrait les remercier; mais c’est le combat de «David contre Goliath». Bref, on ne le dira jamais assez, pensez-y deux fois avant de partager n’importe quoi sur Internet. Effacez/videz tant que vous voudrez, c’est là pour rester – chez votre serveur et le collecteur global NSA [ou d’autres]. Extrait de :
http://situationplanetaire.blogspot.ca/2013/12/la-vie-privee-un-artefact-une-relique.html

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Quelques notes de lecture surveillée tirées d’un article du Guardian, Privacy under attack, par Eben Moglen. L’auteur fait le point sur les conséquences de la surveillance électronique. Historique et procédés de A à Z (passionnant... ça dépasse l’imagination) :  
http://www.theguardian.com/technology/2014/may/27/-sp-privacy-under-attack-nsa-files-revealed-new-threats-democracy

[...] Nous sommes confrontés à deux revendications - vous les rencontrez partout - qui résument les politiques contre lesquelles nous travaillons.

Un argument dit :
"C'est sans espoir, la protection de la vie privée a disparu, pourquoi lutter?"
L'autre dit :
"Je ne fais rien de mal, pourquoi devrais-je m’en soucier?"

Ce sont en fait les plus importantes formes d'opposition auxquelles nous sommes confrontés [...].

En ce qui concerne le premier argument, la lutte pour le droit à la vie privée est loin d'être désespérée. [...] Le désespoir est justement la maladie qu’on veut que vous attrapiez, mais vous n’êtes pas obligé de l’attraper.

En ce qui concerne l'autre argument, notre réponse doit être claire : "Si nous ne faisons rien de mal, nous avons alors le droit de résister."

Si nous ne faisons rien de mal, nous avons alors le droit de faire tout ce qui est nécessaire pour maintenir l'équilibre traditionnel entre nous et le pouvoir qui est à l'écoute. Nous avons le droit d'être obscurs. Nous avons le droit de murmurer. Nous avons le droit d’utiliser des langages qu'ils ne comprennent pas. Nous avons le droit de nous réunir où, quand et de la manière qui nous plaît.
[...]
Dans ce contexte, nous devons nous rappeler que la vie privée concerne notre environnement social, non pas des transactions individuelles que nous faisons avec autrui. Quand nous décidons de livrer nos informations personnelles, nous sapons également la vie privée d'autres personnes. La vie privée est donc toujours une relation entre plusieurs personnes, non pas une transaction entre deux personnes.

Beaucoup de gens vous subtilisent de l’argent en dissimulant cette distinction. En vous offrant un service de messagerie gratuit, par exemple. En retour, ils veulent que vous les laissiez lire tout votre courrier. L’objectif déclaré est la sollicitation publicitaire. C’est juste une transaction entre deux parties. Ou alors, ils vous offrent un hébergement web gratuit pour vos communications sociales, et ensuite ils surveillent toutes les recherches de tout le monde.

C'est pratique pour eux, mais frauduleux. Si vous acceptez cette offre prétendument bilatérale, c’est-à-dire un service de messagerie qui est gratuit tant qu'il peut être lu, eh bien, tous vos correspondants sont soumis à la même contrainte. Si quelqu’un de votre famille reçoit son courrier à Gmail, Google reçoit une copie de toute la correspondance de votre famille également. Si un autre membre de votre famille reçoit son courrier à Yahoo, Yahoo reçoit une copie de toute la correspondance de votre famille aussi.

Peut-être même que ce niveau de surveillance corporative des courriels de votre famille vous semble exagéré. Mais comme les révélations de Snowdon le montraient, à la déconfiture des gouvernements et des compagnies elles-mêmes, les compagnies partagent également tout ce courrier avec le pouvoir qui l’achète, contourne des ordonnances de tribunaux ou le vole – que les compagnies aiment ça ou non.

Il en sera de même si vous décidez de vivre votre vie sociale sur un site web où le malicieux logiciel en marche surveille chacune de vos interactions sociales, garde une copie de tout ce qui est dit, et surveille aussi tout le monde qui surveille tout le monde. Si vous ajoutez de nouveaux "amis" au service, vous les attirez dans cette malicieuse inspection, les obligeant à la subir autant que vous.

C'est un problème écologique, car nos choix individuels aggravent la situation de l’ensemble du réseau. L’intérêt des compagnies de service, mais pas le nôtre, est de masquer cet aspect du problème, et de se concentrer sur le consentement. D'un point de vue juridique, l'essence d’une transaction est le consentement. Si la vie privée est transactionnelle, votre consentement à la surveillance est la seule chose qui compte pour l'espionnage commercial. Mais si la vie privée est bien comprise, le consentement n’est généralement pas pertinent, et se concentrer là-dessus est fondamentalement inapproprié.
[...]
Nous avons perdu la capacité de lire dans l’anonymat, mais cette perte nous est cachée à cause de la façon dont le web est construit. Nous avons fourni aux gens des programmes appelé "navigateurs" que chacun pouvait utiliser, mais nous avons créé des programmes appelés "serveurs web", que seuls les geeks pouvaient utiliser - très peu de gens ont lu un registre de serveur web. C'est un immense échec pour notre éducation sociale en technologie. C’est comme ne pas montrer aux enfants ce qui arrive si des voitures entrent en collision et que les gens ne portent pas de ceinture de sécurité.

Nous n'expliquons pas aux gens comment le journal du serveur web enregistre en détail l'activité des lecteurs, ni tout ce que vous pouvez apprendre sur des tas de gens, entre autres ce qu’ils lisent et et comment ils lisent. À partir des registres, vous pouvez savoir combien de temps chaque lecteur passe sur chaque page, comment il la lit, où il va ensuite, ce qu'il fait ou recherche en fonction de ce qu'il vient de lire. Si vous pouvez collecter toute cette information dans les registres, vous commencez à posséder des choses qui ne vous appartiennent pas.
[...]
Si vous avez un compte Facebook, celui-ci surveille chaque instant que vous y passez. En outre, et encore plus important, à chaque page web que vous ouvrez où il y a un bouton Facebook "j’aime", que vous cliquiez dessus ou non, un rapport de lecture sera envoyé à Facebook.

Si le journal que vous lisez chaque jour a un bouton Facebook "j’aime" ou d’autres services similaires sur ses pages, Facebook ou les autres services surveillent votre lecture : on sait quelles histoires vous lisez et combien de temps vous avez passé sur ces articles.

Chaque fois que vous tweetez une URL, Twitter raccourcit l'URL pour vous. Mais il s’organise aussi pour que quiconque clique sur l'URL soit surveillé par Twitter pendant sa lecture. Vous n'aidez pas seulement les gens à savoir ce qui se passe sur internet, mais vous aidez aussi Twitter à lire derrière l’épaule de vos lecteurs ce que vous recommandez.
[...]
Dans tous les pays du monde où il y a des élections, Google sait pour qui vous allez voter. Il façonne une couverture politique pour vous dans votre news feed personnalisé, basé sur ce que vous voulez lire, sur qui vous êtes et ce que vous aimez. Non seulement il sait pour qui vous allez voter, il vous aide à confirmer votre choix de voter de cette façon - à moins qu'un autre message n’ait été acheté par un commanditaire.

Pas de démocratie sans lecture dans l'anonymat.

1 février 2015

NFL et overdose de malbouffe

J’espère que personne ne succombera à une crise cardiaque, vu le stress de la compétition combiné à l’orgie de malbouffe... Un combo qui peut jouer dur sur les artères.


"Si vous regardez le match de football américain même juste quelques moments, vous voyez que la NFL essaye de vous vendre des déchets. Je ne parle pas de violence ou de corruption; je parle des déchets pour lesquels les gens font la queue au petit-déjeuner, au lunch et au dîner, à chaque jour.
       De septembre à janvier, les chaînes de restaurants envoient des centaines de milliers de dollars dans les réseaux -  qui, à leur tour, enverront des milliards de dollars à la Ligue Nationale de Football  -  pour avoir le privilège d'annoncer leurs dernières innovations en matière de faux fromage fondu et de viande traités chimiquement."  

Source - article (en anglais) :
Over the course of a single week, I ate all 62 of the fast-food meals advertised during the playoffs.
By Ruth Baron
Illustrations by Geoff J. Kim
https://medium.com/matter/lets-go-eat-a-goddamn-snack-the-nfl-cleanse-b21fa806d967


En complément

Le faux fromage dans les plats préparés
Par Lande le breton

C'est vraiment super de penser à ce que nous avalons!

Utilisé chez Pizza Hut : un faux fromage plus vrai que nature – le fromage analogue”.


D’un article étonnant de la diététicienne Paule Neyrat, au sujet de ce faux fromage dont les consommateurs ignorent certainement l’existence :  

Ça ressemble au fromage, ça a le goût du fromage et c’est un scandale alimentaire, il est consommé dans nombre de pizzas, lasagnes, burgers et autres plats industriels imitant la saveur de fromages tels que le gouda, la mozzarella, l’emmental…

Il existe deux versions de fromage analogue inventées par Cargill, fabricant américain de produits pour l’industrie agro-alimentaire implanté dans 63 pays; ça laisse songeur!


La pâte est composée de 15 % de protéines laitières, d’huile de palme (la moins chère mais la plus toxique car c’est une graisse dite “trans” qui a des effets néfastes sur la santé) et de rehausseurs de goût et est utilisée depuis 2007.

L’autre pâte dite le Lygomme TACH Optimum», destinée au marché européen depuis 2009, est composée de trois amidons, d’un galactomannane (E 410, 412, 417), d’un carraghénane (E 407), tous deux des gélifiants, et d’arômes artificiels. Il a fait partie des trois nominés aux Food Ingrédients Excellence Awards 2009, catégorie «Innovation de l’année pour la Laiterie». Ce Lygomme est intéressant pour les industriels car il coûte 60 % de moins que l’autre fromage analogue (et 200 % de moins qu’un vrai fromage) : les firmes se sont ruées dessus depuis la flambée du prix du lait.

En plus, Cargill se glorifie d’avoir inventé un ALIMENT BON POUR LA SANTE car son Lygomme ne contient pas de graisses saturées, ni de lactose et convient aussi bien à l’alimentation halal que kasher (bref, un gros mensonge pour vendre à tout le monde ce qui ne convient en fait à personne).

Vous croyez manger du fromage (donc des protéines et du calcium) avec votre pizza, vos lasagnes, votre burger, mais vous absorbez une infâme pâte qui vous démolit la santé. Le comble de l'hypocrisie : la CEE a autorisé l’emploi de ce "fromage analogue" à condition que les ingrédients qui le composent soient indiqués sur l’étiquette.

Mais qui va regarder ces minuscules caractères? Qui va déchiffrer que le galactomannane et le carraghénane, c’est le "fromage"?

Pour info, la sauce tomate utilisée sur ces aliments est aussi à la tomate ce que ce fromage analogue est à la vraie mozzarella : la sauce tomate utilisée est un assemblage de produits bon marché mais artificiellement goûteux qui sont additionnés à une base de ketchup lui aussi de la plus basse qualité.

Les exemples similaires sont très nombreux. Merci à Pizza Hut et à l’industrie agro-alimentaire en général (appuyée par la grande distribution) qui nous servent de la m...

Et après ça, on viendra s’étonner d’assister à une véritable et inexplicable «épidémie mondiale de maladies humaines» comme l’obésité, le diabète, les allergies, les maladies cardio-vasculaires ou les cancers.

Le but est bien évidemment de faire de l’argent, beaucoup d’argent, d’abord en nous vendant des produits «faciles» et «standardisés» dont le prix de revient est le plus bas possible et ensuite de nous rendre dépendants des médicaments qui vont soi-disant résoudre nos problèmes de santé.

Réfléchissez et soyez critiques quand vous consommez : le moins cher n’est pas forcément le moins cher et la qualité de vie n’a pas de prix. Amoureux des vrais fromages : soyez encore plus vigilants!

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En ce qui me concerne, je dirais : si vous n’êtes pas capable de vous passer de fromage, achetez au moins du bio certifié...

Elle ne veut pas manger ses amis



Pauvre chouette. Comme disait une amie, la sagesse n’attend pas l’âge. En même temps, cela tend à confirmer qu’un tel choix n’est pas fonction du milieu de vie, mais plutôt de quelque chose de plus profond. Par chance, son père semble vouloir respecter son désir d’être végétarienne. “I don’t like that they [the farmers] chop animal-people up”, dit-elle; ce que George Bernard Shaw exprimait ainsi : «Les animaux sont mes amis... et je ne mange pas mes amis.»

«Parfois on peut beaucoup apprendre des enfants, il suffit de les écouter.»   

Pourquoi je suis végétarienne
Par Shubhra Krishan (Care2)

On me demande souvent pourquoi je suis végétarienne. «Religion?» «Non-violence?» «Tu n’aimes pas le goût?» Les questions sont posées sur un ton variant de la curiosité à l'incrédulité. Une femme, une connaissance, avec qui je prenais une marche, s’est carrément arrêtée quand je lui ai dit que je n'avais jamais mangé de viande. Je me souviens encore du choc qui papillonnait dans ses yeux bleus dilatés... «Quoi, tu veux dire que tu n’as jamais goûté à un steak?»

«Jamais», ai-je répondu, stupéfaite moi-même que quelqu'un soit tellement surpris de ce qui a toujours été mon mode de vie.

J’entends souvent cet autre commentaire : «Tu ne sais pas ce que tu manques!»

Alors, pourquoi suis-je végétarienne?

Eh bien, je suis née dans une famille de brahmanes et de jaïnistes, deux collectivités indiennes qui évitent la nourriture «non-végétarienne». Ma grand-mère maternelle, en fait, ne mangeait jamais de pommes de terre, de carottes ou autres légumes-racines – de par une croyance jaïniste à savoir qu’une fois déracinés ils transmettent des millions de germes microscopiques que nous consommons, et qu’il vaut mieux les éviter. Les Brahmanes (du côté de mon père) interdisent non seulement la viande et les fruits de mer, mais également les oignons et l'ail. Mais, avec le temps, les règles se sont progressivement assouplies. Mes grands-parents étaient des végétariens stricts, mais mes parents mangeaient des oignons et de l'ail. Quand nous sommes nés, ma mère avait lu au sujet de la protéine contenue dans les oeufs de sorte que nous avons été nourris d'omelettes et de toasts.


À mon adolescence, j'étais entourée de filles et de garçons ayant les mêmes antécédents mais qui, loin du regard de leurs parents, appréciaient la Pizza au Pepperoni et les hot-dogs. Mon frère aimait bien le poulet tikka.

Toutefois, je n’ai jamais été tentée.

La raison : Je n’arrive pas à considérer la chair animale et la viande comme de la nourriture. La peur et l'impuissance dans les yeux de l’animal juste avant d'être abattu...  cette seule pensée me fait frémir. L’origine de ce sentiment que plusieurs classent comme une croyance religieuse, pourrait venir de mes ancêtres; mais pour moi ce n'est rien d’autre qu’un choix individuel. Et si je parle de ce choix ici, c'est simplement parce que je n'ai jamais demandé à personne avec étonnement : «Tu veux dire que tu manges de la viande? Comment fais-tu?!»

À la brigade tu-ne-sais-pas-ce-que-tu-manques je réponds que je ne veux pas le savoir! J'aime le monde merveilleux des fruits, des légumes et des grains entiers. C’est tellement varié, frais et délicieux. Et, concernant les prescriptions alimentaires, j'aime rappeler gentiment à mes amis carnivores que l’éléphant si puissant est aussi végétarien.

Photo : Farm Sanctuary http://www.farmsanctuary.org/ un refuge pour animaux d'élevage rescapés des camps de concentration de l'agrobusiness.


Si la question vous intéresse, visitez les libellés Végétarisme et Zoofriendly.

C’est la sensibilité qui différencie le vivant du robot. Un objet ne peut pas éprouver de la souffrance, de la tristesse, de la joie, de l’affection, de l’attachement... Mais les animaux qui ne sont pas des «objets» en sont capables. S’ils n’étaient pas dotés de sensibilité, on ne les utiliserait pas en laboratoire pour tester le seuil d’endurance à la douleur et d’autres effets physiologiques conséquents au fait de ressentir.

Pensée du jour

[Le goût des restaurants] est un goût qui trahit carence, pauvreté, détresse. C'est pourquoi les grands chefs sont si grincheux, les gourmets si maniaques et snobants. Il faut dire la vérité : le spectacle qu'offrent ceux qui mangent dans les plus grands restaurants est lugubre. ~ Pascal Quignard