20 juin 2014

Au dossier "mensonge"

(Si la vie te donne des citrons,
ajoute simplement de la vodka)

Sérieusement, je n’aurais pas voulu être à la place d’Anne-Marie Dussault au 24/60, jeudi dernier. Une interview «disque rayé» très embarrassante avec Nathalie Normandeau. Impossible de sortir du sillon : esquives, répétitions par-dessus répétitions.
       Certaines personnes ignorent qu’elles mentent; on les dit victimes de leurs propres illusions. Mais, il arrive aussi qu’un menteur, au bout d’un certain temps, se mette à croire à ses propres mensonges. Dans ce cas, ce n’est plus un menteur, et ses mensonges sont plus difficiles à détecter. De toute façon, tant qu’il n’y a pas preuves irréfutables pour le contredire, il continuera de s’indigner parce qu’on ose douter de son intégrité…
       En tout cas, je n’ai jamais entendu le mot «jamais» autant qu’à la Commission Charbonneau – généralement répété trois fois par les témoins quand ils nient vigoureusement des allégations… 

Voyez l’interview http://ici.radio-canada.ca/collusion-qc  et amusez-vous à observer  les attitudes avec ces quelques données :
       «Le regard s’oriente différemment sous le coup de plusieurs émotions : vers le bas avec la tristesse; vers le bas ou de biais avec la honte ou la culpabilité; il se détourne avec le dégoût. Pourtant, même un menteur coupable ne risque pas de beaucoup détourner le regard, car il sait que tout le monde pense pouvoir détecter la tromperie ainsi. Il est facile de contrôler la direction de son regard. Curieusement, les gens continuent de se laisser berner par des menteurs assez habiles pour ne pas détourner le regard. L’une des choses qui attira Patricia Gardner chez Giovanni Vigliotto était son ‘allure sincère, le fait qu’il regardait droit dans les yeux’, a-t-elle déclaré au procès pour bigamie.
       Les pupilles se dilatent en cas d’émotion, et personne n’a la possibilité de le faire délibérément. La dilatation des pupilles est produite par le système nerveux autonome. Celui-ci déclenche également des modifications faciales.»
       «Les mobiles de mensonge : éviter d’être puni; obtenir une récompense impossible à obtenir autrement; protéger quelqu’un d’un châtiment; se protéger d’une menace physique; gagner l’admiration d’autrui; échapper à une situation sociale embarrassante; éviter la gêne; garder une certaine intimité; exercer un pouvoir sur autrui (en contrôlant l’information dont bénéficie la cible).»
       ~ Paul Ekman

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Quelques réflexions supplémentaires au dossier mensonge qui prend du volume proportionnellement à notre usage du mensonge dans nos sociétés J  

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Une scène du film "Something’s Gotta Give" illustre succinctement une réalité concernant la vérité. Apprenant que l'homme qu'elle aime fréquente une autre femme, Diane Keaton quitte le restaurant pourchassée par un Jack Nicholson à l’air coupable et confus. Lorsque finalement il la rejoint, il déclare : «Je ne t'ai jamais menti, je t'ai toujours donnée une version de la vérité.» Elle répond alors : «La vérité n'a pas de versions, ok?» Et ça, c'est la vérité. La vérité peut avoir plusieurs côtés. C’est peut-être compliqué ou difficile à comprendre, mais elle existe… en version "complète". Mais, nous avons un problème avec la vérité. Nous ne sommes peut-être pas carrément des menteurs, mais nous masquons la vérité pour qu’elle s’ajuste à notre vie – pour éviter qu’elle ne perturbe notre carrière, nos relations ou simplement notre journée.
       La chercheuse Bella DePaulo, Ph.D. a constaté que dans leurs interactions quotidiennes les gens mentent une fois sur cinq. Pamela Meyer, auteur de Liespotting, affirme qu’on nous ment entre 10 et 200 fois par jour. Le monde que nous avons créé autour de nous est-il honnête? À quelle fréquence mentons-nous, nous-mêmes? Intimidons-nous les autres au point de les encourager à masquer la vérité?  
       Habituellement, les gens ne révèlent que des parcelles de vérité, celles qu'ils jugent acceptables ou que les gens veulent entendre, dissimulant ainsi la vérité complète. Ils peuvent mentir par omission ou utiliser de «petits mensonges pieux» pour créer une image de la réalité très différente. Non seulement ces mensonges nuisent à leurs relations, mais ils peuvent carrément les détruire. Même les mensonges pour protéger les autres peuvent abimer votre estime de soi car vous n’avez pas le sentiment d’être une personne authentique et courageuse quand vous êtes malhonnête.

Lisa Firestone, Ph.D. (Why We Lie and How to Stop) http://www.psychologytoday.com/blog/compassion-matters/201309/why-we-lie-and-how-stop  

(Ces choses-là me rendent la vie difficile)

Mensonges, vérité et compromis
Par Russell C. Smith et Michael Foster

Sommes-nous programmés pour mentir?

On dit aux enfants que les tricheurs ne gagnent jamais, et que les gagnants ne trichent jamais. On leur enseigne à toujours dire la vérité, puisque mentir c’est mal. Ce sont de bonnes attitudes à implanter chez les jeunes, dans toutes les cultures. Or en vieillissant, on se rend bien compte que parfois les tricheurs gagnent. Très souvent, ils gagnent gros, puis, ils tombent en disgrâce lorsqu’on découvre la vérité au sujet de leurs victoires compromettantes. Les tricheurs qui gagnent agissent souvent comme des animaux immobilisés par l’ennemi lorsqu’on découvre l'énormité de leurs mensonges. L’instinct de survie embarque; et le cycle du mensonge continue.

Les mensonges sont omniprésents dans notre propre vie. Généralement sous forme d'innombrables petites impostures. Bon nombre de ces mensonges sont dus à des pressions internes en vue de réussir, d’être socialement accepté ou d’atteindre un objectif. Lorsqu'un ami ou un proche nous demande une opinion juste et impartiale sur quelque chose qui leur tient à coeur, nous ne voulons pas enjoliver notre véritable opinion, mais nous savons qu'il le faut. Les petits mensonges protègent contre les grandes blessures. Les gens mentent pour esquiver la responsabilité, la punition et le jugement.

Les politiciens mentent au sujet de leurs activités sexuelles ou de leur orientation sexuelle. Les athlètes mentent au sujet de leurs performances : ont-ils gagné à l’aide de drogues ou ont-ils gagné de par leurs aptitudes physiques naturelles? Les courtiers de Wall Street mentent à propos des sommes qu’ils ont volées et de ce qu'ils ont fait de l’argent ensuite. À tous les jours, on utilise  le «mensonge pieux» en rapport avec le temps, l'argent et les relations.

En vérité, nous mentons beaucoup plus souvent que nécessaire. Notre cerveau reptilien, responsable du pattern «fuite / attaque», fonctionne toujours de la même manière, quel que soit le problème. Sauf qu’au lieu de fuir, nous mentons : des petits mensonges pour échapper à des conséquences mineures, et de plus gros mensonges pour ajuster la réalité aux situations. Les enfants mentiront après avoir commis un petit délit comme mettre le doigt dans le crémage du gâteau et le lécher. Ils nieront même si leurs lèvres sont couvertes de glaçage.

La seule personne à qui nous ne devrions pas mentir aussi souvent c'est à nous-mêmes. La société nous invite, et même nous conditionne,  à croire que le mensonge est une activité essentielle pour faire avancer la civilisation. La théorie du mythe stipule aussi que les mythes ont été créés pour contrôler les sociétés et ainsi en assurer la stabilité. Quand ces idées et ces histoires sont déformées, elles peuvent rapidement mener au délire fonctionnel. Que se passe-t-il quand une leçon de morale positive est construite à partir d'un grave malentendu? Dans le domaine de l'intégrisme, le terrorisme peut appartenir à ce type de délires fonctionnels. À quel genre de mensonges internes une personne doit-elle croire pour volontairement se faire exploser en morceaux?

Les mensonges que la société nous a inculqués depuis la naissance sont enracinés dans notre psychisme. Les plus dangereux commencent à être plus faciles à repérer, et les gens sont plus disposés à s’affirmer et à affronter la tromperie des corporations, les mensonges destructeurs des politiciens et les mensonges destinés à renforcer des normes sociales dépassées. Il nous appartient de prendre le temps nécessaire pour remettre en question ce que les gouvernements nous ont dit au sujet de nos programmes sociaux et nos institutions.

Devrions-nous nous préparer à un monde de plus en plus hyper connecté où la transparence, due à la technologie, fera en sorte qu’il sera plus difficile de tromper? Lorsque tout ce qui concerne votre personnalité est disponible en ligne, les gens s’attendent instantanément à des caractéristiques comportementales spécifiques. Des employeurs potentiels ont trouvé sur Facebook des photos de candidats socialement et sexuellement compromettantes. Étant donné le manque de contrôle sur les profils en ligne, des lois ont été adoptées pour empêcher les employeurs potentiels d’exiger les mots de passe des réseaux sociaux des candidats. On doit se poser la question suivante : comment la vie sociale et la carrière des citoyens ont-elles pu s’entremêler de la sorte?

Les mensonges peuvent nous sauver la vie, et les mensonges peuvent aussi radicalement modifier le cours des événements de notre vie. On nous dit que, tôt ou tard, la justice l’emporte, et que la vérité sortira. Éventuellement, les superordinateurs pourraient assumer le rôle d’arbitres en justice. Programmés pour être neutres, ces juges virtuels rendraient des jugements impartiaux basés sur les moindres parcelles de vérité disponibles. Entretemps, nous pouvons essayer d'être un peu plus honnêtes avec nous-mêmes et les autres car le futur pourrait nous y astreindre.

http://www.psychologytoday.com/blog/reinvent-yourself/201406/lies-truth-and-compromises-are-we-hardwired-lie

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