27 janvier 2011

Anesthésiant onéreux

De mon marché aux puces d’emails : deux vieilleries toujours d’actualité (peut-être plus que jamais!).   


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L’alcool

Aimeriez-vous tester vos connaissances sur l’alcool et l’alcoolisme? Il vous suffira de répondre «vrai» ou «faux» aux énoncés suivants.

1. Pour éviter de devenir alcoolique, le secret consiste à savoir comment boire.
2. L’alcoolisme est en réalité le résultat d’un déséquilibre du métabolisme. De plus, certaines personnes semblent être allergiques à l’alcool.
3. Un whisky par jour vous protège contre les crises cardiaques.
4. Boire modérément constitue un gage de longévité.
5. Il n’y a rien de mauvais en soi dans l’alcool.

C’est fini! Si vous avez répondu «vrai» à un seul de ces énoncés, vous pouvez vous donner un beau zéro. Disons plutôt que vous pouvez décerner cette triste note à tous les articles de journaux et à tous les programmes de télévision qui vous ont bourré le crâne avec de telles bêtises. Dans les paragraphes qui suivent, vous allez lire quelque chose que vous n’avez peut-être jamais lu auparavant : la vérité non édulcorée sur les boissons alcoolisées. Il s’agit de faits de nature scientifique et non point de jugements de nature morale. Lisez ce qui suit et tirez-en vos propres conclusions.

Le mot «alcool» identifie une famille de produits chimiques organiques qui comprennent, entre autres, l’alcool de bois, l’alcool à friction, l’alcool de consommation courante et une douzaine d’autres produits du même genre. L’alcool que les gens boivent se nomme alcool éthylique ou éthanol. Il est le produit de la fermentation de sucres naturels et contient deux atomes de carbone, six atomes d’hydrogène et un atome d’oxygène. Il s’agit d’un liquide limpide, à l’odeur caractéristique.

Lorsque vous absorbez de l’alcool, plusieurs organes de votre corps, appelés organes-cibles, se trouvent affectés. Le plus touché est sans contredit le cerveau, car l’effet de l’éthanol sur ce dernier est progressif et s’accroît selon la dose que l’on absorbe. Jusqu’à maintenant, rien à signaler. Il s’agit simplement de données techniques. Le plus intéressant reste à venir. L’alcool agit sur le cerveau de la même façon, ou presque, que l’éther et autres anesthésiques employés en chirurgie. Au premier stade, qui correspond à deux consommations, vous vous trouvez dans un état de détente et d’euphorie. C’est ce que les opérés ressentaient autrefois après avoir reniflé deux bonnes bouffées d’éther. Deux consommations de plus (ou deux autres bouffées d’éther) et le sujet commence à s’agiter et à montrer des symptômes d’excitation. C’est exactement ce qui se passe lorsque le chef de bureau commence à raconter d’une voix de stentor des blagues ultra-lestes à la sauterie de Noël. Deux autres consommations engendrent un état d’analgésie, un mot qui vient du grec analgesia et signifie «abolition de la sensibilité à la douleur». C’est à ce stade-ci que les inhibitions sexuelles battent en retraite et que les grossesses non désirées font leur apparition tambour battant. C’est également à ce stade que le dentiste peut vous arracher cette vilaine dent de sagesse sans vous faire trop de mal. Continuez à boire (ou à renifler de l’éther) et vous atteignez le stade de la relaxation musculaire et du manque de coordination. Vous ne pouvez plus marcher droit et commencez à répandre le contenu de votre verre sur votre plastron. Continuez encore et vous atteindrez finalement le stade de l’anesthésie totale, celui où l’on pourrait vous couper la jambe sans une seule protestation de votre part. D’ailleurs, voilà deux siècles, c’est exactement ainsi que ça se passait. Les chirurgiens de l’époque vous gavaient d’eau de vie et, dès que vous perdiez conscience, faisaient leur office.

L’un des symptômes qui suivent l’absorption massive d’alcool est l’amnésie. À votre réveil, vous ne vous souvenez plus de rien. Cette situation peut se révéler des plus embarrassantes lorsque, par exemple, vous ne vous souvenez plus du nom de la fille que vous avez mise enceinte. Elle est encore plus embarrassante lorsque vous ne vous souvenez plus de celui qui vous a mise enceinte… On peut résumer les effets de l’alcool sur le cerveau en ces termes : il neutralise les différentes fonctions du système nerveux selon un processus très précis. Les premières facultés à être atteintes sont les facultés intellectuelles, puis c’est au tour des réactions à la douleur, du raisonnement, des systèmes sensori-moteurs. Finalement, c’est la perte de conscience. Poussé à l’extrême, le processus d’absorption transforme un être humain en une sorte d’amibe gélatineuse, une entité biologique primaire, existant à peine.

D’un point de vue purement scientifique, il est évident que les dommages occasionnés au cerveau par l’absorption de boissons alcoolisées sont de nature cumulative. L’alcool est un produit toxique qui affecte les cellules cérébrales chaque fois qu’elles y sont exposées. Au bout d’une vingtaine d’années d’exposition à des quantités appréciables d’alcool, le cerveau d’un bon buveur peut présenter d’irrémédiables lésions. Dans certains cas, elles peuvent être limitées [oublis, négligence des soins corporels]. À l’extrême, le sujet peut se retrouver avec le syndrome de Korsakoff : maladie mentale incurable [pertes de mémoire, manque de motivation, polynévrite, accès d’hilarité subite].  

L’alcool affecte également d’autres parties de l’organisme. Comme tout le monde, vous avez dû lire certains de ces articles plus ou moins ineptes qui vous affirment «qu’un ou deux whiskies sont excellents pour le cœur». En fait, c’est exactement le contraire. Il a été prouvé hors de tout doute que l’alcool cause la constriction, le resserrement des artères. Si vous tenez à vous payer un infarctus dans les meilleurs délais, surtout si vous y êtes candidat, n’attendez pas. Il vous suffit de prendre tous les soirs deux verres bien tassés. Un autre conte de fées du genre revient périodiquement dans les journaux. On vous raconte qu’au terme d’une «découverte sensationnelle» il a été prouvé que les bons buveurs vivaient plus longtemps que les autres! (…) Demandez-vous qui a bien pu commanditer les statistiques citées dans les articles dont nous venons de parler. Les réponses pourraient être fort révélatrices.

La pure vérité est que l’alcool est un produit toxique qui cause des dommages physiques et mentaux. Il n’a jamais contribué à accroître la longévité de qui que ce soit. Jamais! (…)

Et maintenant, demandons-nous pourquoi les gens boivent. À la base, il existe deux raisons pour cet état de choses. Tout d’abord, les gens boivent parce qu’on leur dit de boire. Si vous voulez vous amuser à compter combien de fois par jour l’homme de la rue se trouve exposé à des annonces de boissons alcoolisées – bières, vins, liqueurs – les résultats vous convaincront. S’il ne se trouve pas exposé à au moins une centaine d’impacts publicitaires (c’est ainsi qu’on appelle ce genre d’agression dans le monde de la «pub»), c’est qu’il vit quelque part au milieu du désert de Gobi. La manière dont on essaie de vous convaincre de consommer de l’alcool est des plus convaincantes. Les annonces vous montrent des créatures de rêve, des jeunes gens virils, des hommes d’âge mûr, archétypes du père digne et d’autres personnages sympathiques pour faire pencher la balance en faveur des distilleries et des brasseries. L’environnement dans lequel ces gens évoluent est toujours raffiné et luxueux et le message avec lequel on rebat les oreilles est toujours le même : Si vous tenez à vivre heureux, à être riche, à être aimé, buvez que diable!

Vous souvenez-vous de ces annonces de whisky mettant en vedette toute une série «d’hommes de distinction»? On y voyait des gentlemen élégants et manifestement riches, drapés dans ces habits de soirée de grande coupe, dans une bibliothèque lambrissée de boiseries en chêne. Ils sirotaient, bien sûr, un verre de whisky. Le message était simple : si vous désirez être riche et porter un smoking dans une gentilhommière de quatre millions de dollars, il vous suffit de boire telle ou telle sorte de whisky. Ce qu’on ne vous montre jamais, c’est un pauvre ivrogne en guenilles, le visage couvert de croûtes, vautré sur un matelas détrempé de pissat, dans un asile de nuit. L’erreur que cet infortuné a dû commettre, c’est d’avoir sans doute changé de marque de tord-boyau. N’est-ce-pas?

La seconde raison pour laquelle les gens boivent est beaucoup plus subtile. Le fait de boire occasionne une lobotomie chimique temporaire que tout être humain peut facilement s’infliger. Un simple verre d’alcool agit brutalement sur la partie la plus sophistiquée du cerveau, les lobes préfrontaux, où prennent forme les sentiments de culpabilité, de loyauté, d’honnêteté, de moralité, de crainte, d’anxiété. Tous ces sentiments sont, en fait, solubles dans l’alcool. Après quelques verres, la plupart des tensions et des soucis occasionnés par ces valeurs s’estompent. C’est l’une des raisons pour lesquelles on peut dire que l’alcool est le seul véritable lubrifiant sexuel. C’est aussi pourquoi, plus vos occupations sont complexes et exigeantes, plus vous anticipez ce «repos du guerrier» qui vous permettra enfin de dissiper toutes les tensions qui surnagent à la surface de votre mémoire. (…)

Abordons maintenant une question plus délicate. Qu’est-ce que l’alcoolisme? Comme dans beaucoup de choses, certains «experts» en médecine se font fort de définir ce terme. Selon eux, un alcoolique «occasionnel» est une personne qui prend une cuite quatre fois par an environ et quelque fois un peu plus. Un alcoolique «moyen» est quelqu’un qui se soûle plus de douze fois l’an et se retrouve avec «du vent dans les voiles» plus d’une fois par semaine. Quant aux alcooliques graves, je vous laisse le soin de les définir! Hélas! comme toujours, des définitions médicales aussi rigides n’ont pas grand sens.

À toutes fins utiles, un alcoolique est quelqu’un qui boit pour la sensation d’ivresse que l’alcool lui procure et qui a recours à cette boisson pour obtenir un effet tranquillisant. Cela ne veut pas dire qu’un alcoolique soit nécessairement un hurluberlu qui titube et se ridiculise en public : il s’agit simplement d’une personne qui utilise l’alcool comme une béquille psychologique et cela varie d’un individu à l’autre. Quelquefois, une personne timide prendra quelques verres pour affronter ceux avec qui il doit transiger. On voit fréquemment des administrateurs surmenés se détendre avec un ou deux doubles scotches après une dure journée passée dans le panier de crabes des bureaux de direction. Dès que les chaînes de montage s’arrêtent, une foule d’ouvriers s’empressent d’oublier leur dur labeur en se précipitant vers les pompes à bière pour en prendre «une ou deux», un euphémisme qui peut souvent signifier, six, voire douze ou plus…

Ces gens sont-ils des alcooliques? Bien sûr! Oh! je sais… il ne s’agit certes pas de pitoyables ivrognes, mais ils utilisent l’alcool pour les effets psychologiques qu’il peut leur procurer et pour insensibiliser leur cerveau contre les effets abrasifs et les tensions de la vie quotidienne. Doivent-ils s’arrêter de boire? Voilà une question fort personnelle. Il faut d’abord comparer les avantages et les inconvénients de cette drogue qui s’appelle alcool. 

1. L’alcool est un léger tranquillisant.

2. Il est l’une des deux drogues psychotropes dont l’usage est toléré dans nos sociétés (l’autre étant le tabac).

3. L’alcool est une drogue légale.

4. Même lorsqu’on en prend modérément, il endommage lentement mais sûrement l’organisme.

Voyons maintenant l’autre côté de la médaille, c’est-à-dire les désavantages de l’alcool éthylique.

1. L’alcool est cher. Même en buvant modérément, vous pouvez dépenser jusqu’à dix pour cent de vos revenus pour sacrifier sur l’autel de votre habitude. Si vous êtes gros buveur ou si vous vous payez des boissons de fantaisie, ce pourcentage peut tripler, voire quadrupler.

2. L’alcool est la cause de graves problèmes sociaux. Quatre-vingt-dix pour cent des accidents d’auto mortels surviennent lorsque les conducteurs ont leurs facultés affaiblies par l’alcool. Quatre-vingt pour cent des actes criminels violents sont perpétrés par des individus se trouvant sous l’influence de boissons alcoolisées tandis que soixante-quinze pour cent des suicides sont commis par des désespérés ayant absorbé des quantités appréciables de liquides enivrants. Enfin, plus de la moitié des incendies résidentiels sont imputables à des causes que l’on peut relier à des drames de l’alcoolisme.

3. Médicalement parlant, l’alcool est une drogue qui cause une accoutumance. Un sevrage brutal produit des symptômes de privation. Ces derniers sont tolérables chez le buveur léger. Il n’en va pas de même pour le gros buveur chez qui ils se manifestent de manière particulièrement tragiques (qui n’a pas entendu parler du délirium tremens?) pouvant aller jusqu’à la mort.

4. L’alcool peut engendrer de sérieux problèmes d’ordre physique. La cirrhose du foie, les gastrites chroniques, les affections rénales, l’obésité, les troubles neurologiques et autres maladies peuvent fort bien, après quelques années, être le résultat de l’absorption de boissons alcoolisées, même de façon dite «modérée».

Après ce bilan, une question demeure : devriez-vous continuer de boire? Il s’agit, évidemment, d’une décision personnelle.

Auteur : Dr David Reuben, psychiatre; 1982  

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COMMENTAIRE :

En tout cas, on ne pourra jamais nous faire croire que l’alcool rend plus intelligent - notamment quand on songe aux activités de calage - comme le confirme le trait d’humour suivant…

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«La modération a bien meilleur goût!»  
(Auteur inconnu)

La Société des Alcools du Québec (SAQ) a décidé de passer à l'action – à voir les caisses empilées dans les allées des succursales on constate qu’ils sont fin prêts à faire campagne en faveur de la modération!

Quoi qu’il en soit, s'inspirant des avis dissuasifs figurant sur les paquets de cigarettes, des avis du même genre seraient ajoutés sur les étiquettes des bouteilles d'alcool. En voici quelques exemples :

DANGER : La consommation d'alcool peut vous laisser croire que vous murmurez, alors que ce n'est pas vraiment le cas!

DANGER : La consommation d'alcool peut vous amener à répéter, et répéter, et encore répéter à vos amis que vous les aimez!

DANGER : La consommation d'alcool peut vous laisser croire que vous savez chanter!

DANGER : La consommation d'alcool peut vous amener à imaginer que votre ex se meurt d'envie que vous l'appeliez sur son mobile à quatre heures du matin.

DANGER : La consommation d'alcool peut vous amener à vous demander où vous avez bien pu laisser votre string!

DANGER : La consommation d'alcool peut vous faire croire que vous êtes un champion de karaté, et vous causer ainsi de nombreux coups de pied au cul…

DANGER : La consommation d'alcool peut entraîner des visions vraiment terrifiantes quand vous ouvrez les yeux le lendemain matin.

DANGER : La consommation d'alcool est la principale cause des brûlures inexplicables sur les tapis, au front, aux genoux et au bas du dos!

DANGER : La consommation d'alcool peut vous laisser croire que vous êtes invincible et invisible!

DANGER : La consommation d'alcool peut malheureusement vous amener à penser que les gens rient AVEC vous!

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